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La Perruque est une revue de 1 × 90 cm qui publie des spécimens typographiques. Cet étrange format glané chez les imprimeurs définit le modèle économique de sa publication. Avec la volonté de limiter et de valoriser les chutes, La Perruque passe des « deals » avec des imprimeurs qui lui permettent d’exploiter les espaces vacants en marge de leurs impressions courantes. Ces espaces vierges sont ensuite proposés à une communauté de typographes qui s’en saisissent et les requalifient. Imprimé dans les marges d’impressions offset, chaque numéro constitue le spécimen d’un caractère typographique et l’ensemble des numéros tisse un fil entre les contributions des dessinateurs de caractères et graphistes, pour dresser le portrait d'une certaine communauté typographique contemporaine. Lieu de villégiature en ligne des contributions, ce site internet propose aussi de rendre visibles les processus de création des caractères ainsi que les éléments qui définissent les contours de la revue.
« [La perruque] se généralise partout [...]. Accusé de voler, de récupérer du matériel à son profit et d’utiliser les machines pour son propre compte, le travailleur qui “ fait la perruque ” soustrait à l’usine du temps (plutôt que des biens, car il n’utilise que des restes), en vue d’un travail libre, créatif et précisément sans profit. Sur les lieux mêmes où règne la machine qu’il doit servir, il ruse pour le plaisir d’inventer des produits gratuits destinés seulement à signifier un savoir-faire propre et à répondre par une dépense à des solidarités ouvrières ou familiales. Avec la complicité d’autres travailleurs (qui font ainsi échec à la concurrence fomentée entre eux par l’usine), il réalise des “ coups ” dans le champ de l’ordre établi. »
Michel de Certeau, L’invention du quotidien, t.1 : Arts de faire, Poche, 1990, p.45
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(La Perruque est une revue éditée par Surfaces Utiles)
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La Perruque est une revue de 1 × 90 cm qui publie des spécimens typographiques. Cet étrange format glané chez les imprimeurs définit le modèle économique de sa publication. Avec la volonté de limiter et de valoriser les chutes, La Perruque passe des « deals » avec des imprimeurs qui lui permettent d’exploiter les espaces vacants en marge de leurs impressions courantes. Ces espaces vierges sont ensuite proposés à une communauté de typographes qui s’en saisissent et les requalifient. Imprimé dans les marges d’impressions offset, chaque numéro constitue le spécimen d’un caractère typographique et l’ensemble des numéros tisse un fil entre les contributions des dessinateurs de caractères et graphistes, pour dresser le portrait d'une certaine communauté typographique contemporaine. Lieu de villégiature en ligne des contributions, ce site internet propose aussi de rendre visibles les processus de création des caractères ainsi que les éléments qui définissent les contours de la revue.
« [La perruque] se généralise partout [...]. Accusé de voler, de récupérer du matériel à son profit et d’utiliser les machines pour son propre compte, le travailleur qui “ fait la perruque ” soustrait à l’usine du temps (plutôt que des biens, car il n’utilise que des restes), en vue d’un travail libre, créatif et précisément sans profit. Sur les lieux mêmes où règne la machine qu’il doit servir, il ruse pour le plaisir d’inventer des produits gratuits destinés seulement à signifier un savoir-faire propre et à répondre par une dépense à des solidarités ouvrières ou familiales. Avec la complicité d’autres travailleurs (qui font ainsi échec à la concurrence fomentée entre eux par l’usine), il réalise des “ coups ” dans le champ de l’ordre établi. »
Michel de Certeau, L’invention du quotidien, t.1 : Arts de faire, Poche, 1990, p.45
Le format, le papier, le type d’impression, le nombre d’exemplaires, le temps et l’organisation de la production de la revue varient en fonction des perruques glanées chez les imprimeurs offset Média Graphic à Rennes [FR] et Cassochrome à Waregem [BE].
Gabarit Offset 900 × 640 mm 900 × 10 mm (R°/V°) coupes
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Cette bibliographie tente de définir le support de la discussion autour de laquelle s’articule la revue. S’y côtoient des fictions et des écrits théoriques qui soulèvent la question des procédés de reproduction et de leurs limites, ainsi que quelques exemples de tactiques de résistances au travail. S’y greffent des témoignages de rivalités historiques et contemporaines dans les pratiques de la typographie et du dessin de caractères…
• Michel Anteby, La « perruque » en usine : approche d’une pratique marginale, illégale et fuyante. Revue Sociologie du travail, 2003, vol. 45, n° 4 pp. 455-456, http://people.hbs.edu/manteby/SocioduTravail.pdf (PDF). • Daniel Bensaïd, Les dépossédés : Karl Marx, les voleurs de bois et le droit des pauvres, La Fabrique, 2007. • Philippe Beraud, Franck Cormerais, Économie de la contribution et innovation sociétale, in Innovations, n° 34, 2011/1, p. 163-183, http://www.cairn.info/revue-innovations-2011-1-page-163.htm. • Denis Briand, Libérer les machines…, mais de quoi ?, in Libérez les machines !, l’imaginaire technologique à l’épreuve de l’art, ouvrage collectif, sous la direction de Pierre Braun, Éditions Présent composé, Université Rennes 2, p. 76-82. • Barnabé Chaillot, Fabriquer en autoconstruction des systèmes simples et accessibles pour utiliser de l’énergie renouvelable, Chaîne YouTube, date de création : 24 juil. 2013, https://www.youtube.com/channel/UCg7HRuQ93hl9v8dTSt_XDHA/videos. • Alex Chavot, In Conversation With…, Série d’interview réalisées auprès de différents dessinateurs de caractères (Paul Barnes & Christian Schwartz, Matthieu Cortat, Radim Peško, et Ian Party & Emmanuel Rey), 2013, 2014, consultable en PDF sur le site internet d’Alex Chavot. http://www.alexchavot.fr/library.php. • Michel de Certeau, L’invention du quotidien, I. arts de faire, Gallimard, Folio essais, 1990. • Roald Dahl, La grande grammatisatrice automatique, in Bizarre ! bizarre !, trad. de l’anglais par Élisabeth Gaspar et Hilda Barberis, Nouv. éd., Gallimard, 1988. • Michel de Certeau, L’invention du quotidien, I. Arts de faire, Édition de Luce Giard, Nouv. éd., Collection Folio essais (n° 146), Gallimard, 1990. • Christian Fauré, Le travail en perruque à l’heure du numérique, 14 mars 2011, http://www.christian-faure.net/2011/03/14/le-travail-en-perruque-a-lheure-du-numerique/. • Thomas Feuerstein, Sample Minds, Tr. Daniel Ostermann, First published in : Stefan Bidner, Thomas Feuerstein (eds.), Sample Minds. Materials on Sampling Culture, Köln 2004, p. 264 - 275, http://feuerstein.myzel.net/texte/sample_minds_en.html |
• Philip K.Dick, Payez l’imprimeur, in La Planète impossible, Poche, Le grand temple de la S-F, 1989, p. 38-63. • Marjolaine Lévy, Guyton/Epson : exceed your vision, in 20/27 n° 3, 2009, p. 64-79. • Nicolas Malais, Les amitiés et rivalités (typo) graphiques de Remy de Gourmont & Alfred Jarry, in L’étoile-absinthe, Les cahiers de la société des amis d’Alfred Jarry, ouvrage collectif, tournées 111-112, 2006, p. 25-38, consultable en PDF sur le site internet de la Société des Amis d’Alfred Jarry : http://www.alfredjarry.fr/amisjarry/fichiers_ea/etoile_absinthe_111_112reduit.pdf, & les œuvres numérisées d’Alfred Jarry : http://alfredjarry.fr/oeuvresnumerisees/index.php. • William Morris, News from Nowhere or An Epoch of Rest, Kelmscott Press Edition, 1892. News from Nowhere was first published as a serial in the Socialist magazine Commonweal in 1890. It was republished in book form in a revised edition in 1892 and went though many reprintings after that. This text is taken from the 1908 reprinting by Longmans of London. Available on the website Marxists.org : https://www.marxists.org/archive/morris/works/1890/nowhere/nowhere.htm. Nouvelles de nulle part ou Une Ère de Repos, traduites de l’anglais par Victor Dupont en 1957, L’Altiplano, 2009, consultable en PDF sur le site internet de L’Altiplano : http://www.laltiplano.fr/nouvelles-de-nulle-part.pdf. Consulter l’ouvrage original de 1892 sur le site internet Morris edition : http://morrisedition.lib.uiowa.edu/Images/NewsFromNowhere/KelmscottNews/NewsKelmspageflip.html. • Quentin Noirfalisse interview Bernard Stiegler, Vers une économie de la contribution, 30.11.2011, url : http://owni.fr/2011/11/30/ vers-une-economie-de-la-contribution/, et consultable en PDF sur le site internet d’Alex Chavot : http://alexchavot.fr/library.php. • Jacques Rancière, L’art décoratif comme art social : le temple, la maison, l’usine, in Aisthesis, Scènes du régime esthétique de l’art, Éditions Galilée, coll. La philosophie en effet, 2011, p. 161-184. • Agnès Varda, Les Glaneurs et la Glaneuse, 2000, Documentaire, 1 h 22 min, http://www.dailymotion.com/video/xcyr4b_documentaire-les-glaneurs-et-la-gla_shortfilms. |
⇧ Télécharger la bibliographie (PDF) (Édité le 02.04.2016)
La Perruque diffuse ses spécimens à la rencontre de ses lecteurs et lectrices entre différents salons de l’édition, expositions, et autres espaces de promotion de la typographie : • Lancement #1 — 14.04.2016, Bruxelles • Puces Typo — 21.05.2016, Paris • European Maker Week @ iMAL — 03-05.06.2016, Bruxelles • École de recherche graphique — 08.06.2016, Bruxelles • WIELS Art Book Fair — 09-11.09.2016, Bruxelles • Bourse aux livres, Webibli — 08.10.2016, Paris • Publishers fair, @ The Paper Factory, Fedrigoni — 22.10.2016, Bruxelles • Papier Carbone @ BPS22 — 17-18.12.2016, Charleroi • Rencontre & discussion typographique #2 — 19.04.2017, Bruxelles • Chapelle, salon de l'édition de la Biennale de design graphique — 20-21.05.2017, Chaumont • WIELS Art Book Fair — 09-11.09.2017, Bruxelles • Salon Mirage — 15-17.09.2017, Bruxelles • Papier Brûlant @ La Gaîté lyrique — 15.10.2017, Paris • La (Le) Boîte @ quais de la Seine — 21-22.10.2017, Paris • Quoi Matière Signe, festival de graphisme, @ IPN — 25.11.2017, Toulouse • Prix de la gravure et de l'image imprimée, @ Centre de la gravure et de l'image imprimée — 02.12.2017–01.04.2018, La Louvière • Papier Carbone II @ BPS22 — 24-25.02.2018, Charleroi • Artists Print VI, @ BRASS — 09-11.03.2018, Bruxelles • Anti-Aufklärung AA4, @ Point Éphémère — 18-20.05.2018, Paris • Puces Typos #8, @ Campus Fonderie de l'Image — 26.05.2018, Paris • The Smaller The Better, @ 本 \hon\ books — 06-07.2018, Paris • WIELS Art Book Fair — 08-09.09.2018, Bruxelles • Ce n'est pas la taille qui compte, @ Maison d'Art Bernard Anthonioz — 13.09-16.12.2018, Nogent-sur-Marne • RECIPROCITY, triennale de design & d'innovation sociale, @ Espace Saint-Antoine — 05.10-25.11.2018, Liège • Printing Plant, @ Looiersgracht60 — 20-23.11.2018 Amsterdam • One Pice at a Time : les arts tactiques au travail, @ Cabinet du livre d'artiste — 20.12.2018, Rennes • L'occasion fait le larron, exposition de Surfaces Utiles et La Perruque @ 本 \hon\ books — 21.12.2018 — 25.01.2019, Paris • Papier Carbone III @ BPS22 — 15-17.03.2019, Charleroi • Puces Typos #9, @ Campus Fonderie de l'Image — 18.05.2019, Paris • Chapelle, salon de l'édition de la Biennale de design graphique — 25-26.05.2019, Chaumont • BOUND Art Book + Zine Fair @ moCa Cleveland — 06-07.11.2019, Cleveland • WIELS Art Book Fair — 07-08.09.2019, Bruxelles → En commandant La Perruque, vous recevez d'office l'ensemble des numéros déjà parus, excepté les numéros épuisés.
• Espace Multimedia Gantner, Bourogne • ÉESADMM, École supérieure d'art & de design Marseille-Méditerranée • fdddl, Fonds de documentation et de lecture de l'erg, Bruxelles • Frac Bretagne, Rennes • Cabinet du livre d'artiste, Rennes • Antoine Lefebvre Editions, Paris • Collection Livre d'Artiste, Bruxelles
Un projet initié par Olivier Bertrand à l’EESAB - Rennes sous le nom Payez l’imprimeur, et poursuivi à Bruxelles sous le nom La Perruque. La revue est aujourd'hui éditée par Surfaces Utiles, la maison d'édition qui poursuit les intentions éditoriales et économiques de La Perruque. Le site internet a été développé avec l’aide de Thomas Merle et est composé en NotCourierSans, OSP-Foundry. Special thanks à Atelier Bek, Alexandru Balgiu, Raphaël Bastide, Axel Benassis, Yves Bernard, Julie Blanc, Quentin Bodin, Justin Bihan, Alex Chavot, Jil Daniel, Olivier Deleersnyder, George Dupin, Gilbert Fastenaekens, Laura François, Luc de Fouquet, Laure Giletti, Luc Hanneuse, Harrisson, Pierre Huyghebaert, Antonin Lefevre, Felix Luque, Renaud Huberlant, Maxime Kerneis, LabFab - Rennes, Olivier Lamy, Olivier Lebrun, Odile Lemée, Marjolaine Lévy, Lucas Le Bihan, Weiyi Li, Pierre Martel, Lionel Mélin, Pierre Merle, Lucas Meyer, Léa Michel, Jan Middelbos, Laurent Müller, Aurélie Noury, Camille Pageard, David Jonathan Ross, Laurence Soens, Swiss Typefaces (Ian Party, Emmanuel Rey, Denis Moya), Marie Theurier, Marie Tueni, Clément Le Tulle-Neyret, Julien Vallet, Francis Voisin. L'ensemble du contenu disponible sur cette page est placé sous licence libre Creative Common Attribution-NonCommercial-ShareAlike (CC BY-NC-SA) à l'exception des contenus extérieurs conservant leurs propres licences.
N’hésitez pas à nous écrire un email si vous souhaitez recevoir les numéros, proposer une contribution, diffuser la revue, ou simplement pour dire bonjour. |
Email : • bonjour@la-perruque.org Pour se tenir au courant de l’actualité de la revue et des derniers numéros : • @revue_la_perruque |
Proposition ouverte : Lecteurs et lectrices de La Perruque, si vous souhaitez communiquer à propos de communication publicitaire ou hors de propos, ou si vous souhaitez passer une petite annonce, écrivez-nous.
Il vous est possible de soutenir le projet en faisant un don.
Ou pourboire.
Il existe de nombreuses variantes du terme de « perruque » : « bricoles », « pinailles », « bousilles », « pendilles » en France; homers, government job aux États-Unis; fiddling ou pilfering en Angleterre.
Michel Anteby, La « perruque » en usine : approche d’une pratique marginale, illégale et fuyante, Revue Sociologie du travail, 2003, vol. 45, no 4 pp. 455-456.
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Une équipe de lunariens s'est emparé du de La Perruque à l'occasion d'un workshop à La Cambre. Les étudiants de différents ateliers (design, communication graphique, typographie, animation) ont conçu collectivement le spécimen du caractère de Julien Vallet : le Mange-pierre. Sous couvert d'une mission spatiale sur la lune (appelons-la Apollo 15), ils expérimentent les enjeux de la typographie en cartographie et proposent une application utopique de la technologie des variable fonts pour un dessin de cartes essentiellement typographique, fait de « lettres-montagnes, de ligatures-océans et de ponctuations rivières ». Si le spécimen imprimé cartographie une seule longitude de la circonférence lunaire, de nombreuses autres appropriations du caractère de Julien Vallet s'affairent à couvrir le reste de la surface du satellite. L'ensemble de ces appropriations (un mapping vidéo, une documentation élargie, un spécimen animé et le design d'un dispositif d'exposition sur mesure) produites par les étudiants de La Cambre pendant le workshop révèlent et mettent à l'épreuve les intentions typographiques de l'auteur. Elles seront rendues visibles le 22 mars 2019 lors du lancement de ce numéro à Bruxelles, jour de pleine lune (ou presque). Lancement et exposition : Vendredi 22 mars, 18h30 – 22h30 @ Los Atlas Rue du libre examen 15, 1070 Anderlecht Special thanks à tous les participants du workshop : Anicé, Arshia Azmat, Baptiste Betoulaud, Louis-Pierre Caussanel, Adèle Dendaletche, Lola Giffard-Bouvier, Laure Giletti, Pierre Huyghebaert, Alexis Morisson, Sebastien Rabaste, Hugo Roger, Francisco Santamouris, Marie Theurier, Laurine Tribolet, Julien Vallet.
À l'occasion du finissage de l'exposition « One Piece at a Time : les arts tactiques au travail » au Cabinet du livre d'artiste, le revue La Perruque et le journal Sans niveau ni mètre co-éditent en mettant à l'honneur le caractère utilisé dans le journal : l'étrange Covington bricolé par Derek Vogelpohl.
Nous sommes ravis de participer à la Printing Plant Art Book Fair à Looiersgracht60 à Amsterdam (23-25 novembre) pour y présenter Good Surface, le "spin-off" commercial de la maison d'édition Surfaces Utile.
(Image reproduite avec l'aimable autorisation de Archief van de Dienst Ruimtelijke Ordening en rechtsvoorganger: foto's and Stadsarchief Gemeente Amsterdam)
Le bâtiment du centre d'art où se déroule la foire abritait autrefois une usine de carton et de papier qui imprimait également des brochures, des affiches et des cartes pour les artistes et les musées. Il n'y a pas de meilleur endroit pour montrer comment les industries traditionnelles peuvent s'adapter et comment les artistes et les designers peuvent en être à l'avant-garde.
90 cm d'une nouvelle Perruque signée Clément Le Tulle-Neyret sortent tout juste des marges de l'imprimeur. Découvrez ce nouveau numéro et sa large documentation.
En s’intéressant de près à l’infra-mince, le collage des extraits choisis par Clément Le Tulle-Neyret dans le treizième numéro de La Perruque formule une riposte au célèbre adage de Beatrice Warde concernant la typographie en général : « Printing should be invisible ». Avec l’affirmation d’infimes choix partiaux et subjectifs logés dans les deux versions de son caractère, l’Immortel Infra et Acedia, il n’est plus question de ce qui n’est pas visible, mais de ce qui est quasi-invisible.
La Perruque est heureuse de vous présenter deux nouveaux numéros. Une sortie belgo-helvète avec les contributions de Laurent Müller () et de Swiss Typefaces (). Découvrez les numéros et leurs documentations.
Retrouvez la revue La Perruque et les livres de Surfaces Utiles le samedi 25 novembre durant le festival toulousain Quoi Matière Signe, une suite de micro évènements autour du graphisme. Nos publications seront exposées et proposées à la vente dans les baraques éditoriales de l'évènement, aux côtés de nombreux autres éditeurs d'horizons variés.
Crédits photographiques : Audrey Douanne
@ IPN Samedi 25 novembre, de 13h → 20h 30 rue des jumeaux Toulouse → Voir le programme du festival Merci au Collectif IPN pour l'invitation et cette belle initiative!
En équipe avec Surface Utiles, nous avons eu deux fois l'occasion de venir présenter nos livres à Paris en ce mois d'octobre. D'abord à La Gaîté lyrique lors du salon de l'édition Papier Brûlant le 15 octobre, puis pendant le week-end de la Fiac, La Boîte N°31 nous a invité aux côtés de trois autres artistes et éditeurs de Bruxelles à investir l'une des boîtes de bouquiniste que Marie-Ange Guilleminot et Michel-Ange Seretti (avec la complicité de Pierre Leguillon) ouvrent sur les quais de la Seine depuis 20 ans. Avec Denicolai & Provoost, Gevaert Editions et (SIC) nous avons eu le plaisir de vous recevoir, sur le trottoir, les samedi 21 et dimanche 22 octobre.
Merci d'être venus nombreux nous voir au WIELS Art Book Fair 2017 où nous avons eu le plaisir de nous installer pour présenter publiquement les premières publications des éditions Surfaces Utiles et notre mode de production. L'occasion aussi d'inviter quelques complices de notre écosystème à se joindre à nous; étaient présents l'imprimeur Autobahn ainsi que Theodore Bauthier qui présentait son livre Angels Word, en marge duquel ont été imprimés les deux derniers numéros de la La Perruque. Le week-end suivant, nous avons aussi participé au Salon Mirage, un audacieux nouveau festival bruxellois dédié à l'édition qui combinait à la fois un salon du livre, trois expositions et des concerts tous les soirs du 15 au 17 septembre.
La Perruque participe à «Chapelle», la salon de l'édition de la Biennale de design graphique à Chaumont, aux côtés de —zeug, VTF, The Shelf Journal, Sandrine Nugue, 205TF, & d'autres encore… Au plaisir de vous y croiser ! Samedi 20 mai 11H30 → 21H00 Dimanche 21 mai 10H → 16H00 @ La Chapelle des Jésuites, 52000 Chaumont Le messe est donnée par Yassine L'Articho et sponsorisée par l'Association Chaumont design graphique. Le programme est signé Super-Structure.
Un super moment hier à l'Atelier Bek pour la Rencontre et discussion typographique #2 de La Perruque 🚩 Merci à tous d'être venus nombreux rencontrer les pratiques typographiques d'Alice Jauneau, Yoann Minet et du collectif We.ch !
Photos : Marie Lapoutge, CC BY-ND 2.0
Pour fêter la sortie du dixième numéro de La Perruque (déjà !), ce deuxième évènement sous forme de conférences et discussions sera le moment d’articuler les différentes pratiques typographiques des derniers contributeurs de la revue invités pour l’occasion : Alice Jauneau, Yoann Minet et le Collectif We.ch. Un entretien avec l’imprimeur Laurence Soens et une intervention du sociologue et éditeur Stephen Bouquin précéderont les interventions des dessinateurs de caractères pour enrichir et renseigner les moyens de publication hors-normes de La Perruque.
18H30 → 22H00
Rue du ruisseau 15 1080 Bruxelles
♦ Alice Jauneau, N.09 (Graduel) : Alice Jauneau est designer graphique et dessinatrice de caractère. En 2015 elle intègre l’Atelier National de Recherche Typographique (ANRT) où elle imagine le Graduel, une famille de caractères qu'elle poursuivra à la Villa Médicis durant l’été 2016. Ce projet typographique interroge la pratique du pochoir liée à un contexte historique précis. Des lettres « découpées à jour » qui explorent également la notion de lumière dans la création typographique.
♦ Yoann Minet, N.10 (Petite mort) : Yoann Minet dessine des caractères depuis son DSAA Design typographique à l’École Estienne. Après un passage au Typography Cabinet de Ludovic Balland, il collabore avec Production Type puis créer Bureau Brut avec Julia Joffre et Camille Prandi. Ses chantiers typographiques – souvent des caractères de labeur – s’aventurent là où les conventions typographiques sont les plus ancrées afin de les questionner ou de les mettre en porte-à-faux, toujours avec mesure et sans « que la visibilité n’occulte la lisibilité ». À l’occasion du dixième numéro de La Perruque, il développe le Petite mort : un caractère sur-mesure.
♦ Collectif We.ch, N.07 (Savate) : Le collectif We.ch est fondé en 2014 par Hadrien Bulliat et Max Esnée, tous les deux anciens étudiants de l'EPSAA (Ivry-sur-Seine). En dehors de toute commande, le collectif mène librement ses projets de site web interactif, d'édition et de typographie dans lesquels les deux compères cultivent un amateurisme désabusé et une certaine esthétique de la blague. Leur premier caractère, la Savate, s’inspire d’un lettrage vernaculaire croisé dans la rue. Il est distribué par la fonderie Velvetyne.
♦ Stephen Bouquin, sociologue et éditeur : Stephen Bouquin est sociologue (Université Paris-Saclay, Évry) et éditeur militant, auteur de « Résistances au travail » (Syllepse, 2009) et « La valse des écrous. Travail, capital et action collective dans le secteur automobile » (Syllepse, 2006).
♦ Laurence Soens, imprimeur : Laurence Soens est directrice de l’imprimerie Cassochrome (Waregem), spécialisée dans l’impression de livres et catalogues d’art, à l’avant-garde du marché de l’offset numérique de qualité. Complices depuis peu, La Perruque et Cassochrome ont déjà imprimé ensemble les quatre derniers numéros de la revue dans les espaces vacants de ses impressions courantes.
• regarder les conférences du Lancement #1 données en avril 2016 • consulter la documentation élargie du projet
Aujourd'hui paraît la , une “breaking rules typeface” ! Affranchi, Benoît Bodhuin s'y amuse et joue du vocabulaire typographique pour renseigner ce qui caractérise sa fonte.
Chers complices, Un petit mot aujourd'hui pour vous présenter ☞ Surfaces Utiles, la maison d'édition que j'initie et qui poursuit les magouilles et autres expérimentations économiques que La Perruque a entreprises jusqu'à maintenant. Surfaces Utiles, c’est un terrain vague, une friche ou un jardin où l’on cultive et promeut une hétérogénéité de pratiques artistiques, littéraires et (typo)graphiques. C’est un espace éditorial convivial qui se construit grâce à la complicité de ses contributeurs. Si Surfaces Utiles est une maison d'édition, c'est avant tout un terrain de jeux pour continuer d’expérimenter des manières alternatives de travailler ensemble. Pour se lancer, Surfaces Utiles s’aide d’une campagne Kickstarter qui lui permettra de fabriquer quatre livres grâce au financement d’une nouvelle surface d’impression qui agrandira le champ des formats que la maison d’édition propose. Avec mes compagnons de route et amis Chloé Bernhardt et Justin Bihan qui me rejoignent dans cette nouvelle aventure éditoriale, nous sommes persuadés que la proposition économique que nous formulons aujourd'hui saura trouver l'adhésion et l'enthousiasme de nombreux lecteurs-complices ! On vous laisse découvrir tout ça ici, ou là ! Olivier Bertrand, Chloé Bernhardt & Justin Bihan
Deux nouveaux numéros tout droits sortis du chapeau ! N.07 & N.08 : des contributions du Collectif We.ch et de Benoît Bodhuin. La publication de ces deux derniers numéros a été possible grâce à la complicité de l'imprimeur belge Cassochrome. Ce nouveau « deal » nous permet d'agrandir le champ des espaces vacants en marge d'impressions industrielles depuis lesquels La Perruque opère.
La Perruque au BPS22 à Charleroi le 17 et 18 décembre lors de Papier Carbone : festival de l'image imprimée aux côtés de nombreux autres éditeurs.
Lecteurs bruxellois, La Perruque suspendra ses exemplaires lors de la Publishers Fair qui se tient ce samedi 22 octobre à la Paper Factory du papetier Fedrigoni.
@ Bourse aux livres, Webibli (Schoolab, Paris).
La Perruque participera à la Bourse aux livres le samedi 8 octobre 2016, au Schoolab, Paris. L’occasion de fêter la sortie du , une typographie au caractère industriel. À la manière du tapis d’usine dont le déroulement ininterrompu assujetti l’ouvrier à sa tâche, chaque espace blanc de cette dernière perruque marque l’opportunité d’un moment d’évasion, de réflexion. Les termes du « perruquier » se mêlent au vocabulaire technique de l’ouvrier, inversant ainsi tour à tour les rôles. Ces micro-espaces sont des lieux d’opportunités que l’ouvrier s’octroie pour se libérer de l’injonction de son travail, autant d’instants pour « perruquer » sur le tapis roulant que le Kreuz a jalonné de boulons et d’écrous.
Hold up de dernière minute, La Perruque en loucedé @ WIELS art Book Fair aux côtés de Théophile's Paper.
Extrait du prochain numéro de La Perruque…
« Lorsque vous composerez un texte en Millimetre, s’il vous plaît n’utilisez pas l’unité archaïque du point. » .
Retour sur la (N.04) de Justin Bihan : « Le VG5000 est un caractère qui tire son nom du minitel homonyme. […] L’exercice principal a consisté à donner du corps à ses caractères bitmap en tentant de trouver des courbes là où il n’y avait que des angles, […] vestiges des premières fontes numériques. »
La Perruque s’expose à l’iMAL du 3 au 5 juin à l’occasion de l’European Maker Week 2016 – Brussels, aux côtés d’une sélection de travaux d’artistes, designers, makers, hackers et autres bidouilleurs bruxellois.
On collectivisait un stand avec Velvetyne Type Foundry et le collectif we.ch aux Puces Typo 2016. Merci d'être passé nous voir :)
Publication de la documentation de la revue sous forme de restitution post-Lancement #1 à l'Atelier Bek le 14 avril 2016. http://la-perruque.org/lancement1-documentation-&-restitution.html Vidéo des conférences, avec dans l'ordre d'apparition :
En direct du LabFab de l'iMAL (interactive Media Art Laboratory) pour la fabrication des pièces de distribution à la découpeuse laser. Lire la documentation de la fabrication sur wikimal.
Restitution imagée du Lancement #1 le 14 avril 2016 à l'Atelier Bek
Deuxième volet des chroniques Matchbox d'Axel Benassis sur Strabic.Matchbox #2 : l'empire suédois
On parle du Lancement #1 de La Perruque, merci à Large, étapes:, Velvetyne et Pointypo !
Ce premier lancement public articulera les intentions typographiques ou éditoriales des contributeurs invités pour ce temps de rencontre sous forme de discussion entre Raphaël Bastide, Axel Benassis, Justin Bihan et Alex Chavot, ainsi qu'avec l'intervention d'Olivier Lebrun. Cet échange témoignera aussi d'une autre facette du projet qui consiste à rendre visibles les dessous de la création d’un caractère. Aux sensibilités typographiques,
La Perruque — Lancement #1 Jeudi 14 avril 2016 18h30 — temps de discussion puis vernissage — 22h À l'atelier Bek Rue du Ruisseau 15 1080 Bruxelles
Les chroniques Matchbox chez Strabic animées par Axel Benassis et tirées de son projet-exposition Graphisme & Philuménie. Des recherches historiques qui ont notamment donné naissance à la famille de caractères . http://collection-seita.info/
Extrait des prochains 90 cm de La Perruque — N.05 !
Quelques manières de piéger l'encre : Dans le N.01 de La Perruque, Alex Chavot adapte son Grotex au format étroit de la revue et dessine une version spécifique pour les très petits corps : le . Ses pièges à encres sont exagérés de telle sorte qu'ils permettent la lisibilité d'un texte composé en 4 points mais se trahissent eux-mêmes en 10 points. Axel Benassis inverse le procédé et l'applique aussi aux contours extérieurs de la pour compenser l'encre qui viendrait à manger dans le blanc de la lettre lors d'une impression en défonce. Les deux dessinateurs s'inspirent tous deux du travail de Matthew Carter (Bell Centennial) et de Thomas Huot-Marchand (Minuscule) concernant la lisibilité en petits corps, mais les nécessités internes à chaque fonte les font choisir des formes autrement différentes et toujours surprenantes. Dans un registre différent, Justin Bihan adapte le dessin de son revival du pixel à la courbe, de l'écran du Minitel à l'écran Retina. C'est ici un choix esthétique qui tend à transcrire une tension entre deux technologies.
Retour sur le safari-typo d'Axel Benassis pour dessiner la .
Réception du spécimen (le VG5000 Modern en défonce) aux côtés de l'appendice de la revue (N.00). Le tout imprimé sur du 350 g pelliculé !
Le prochain numéro sort bientôt des presses offset de Média Graphic… N.04 Justin Bihan — VG5000 Modern + trame stochastique !
Extrait de la conversation entre Raphaël Bastide et Jean-Baptiste Morizot pendant le développement du .
Alex Chavot commente les opérations qui ont été faites au Grotex pour donner naissance au « ».
Après quelques temps d’attente, le N.03 de La Perruque sort des presses de Media Graphic. Les petites annonces de Raphaël Bastide se prêtent bien au format.
Les deux premières documentations de caractère s’affichent aux côtés des spécimens d'Axel Benassis et Raphaël Bastide. On y lit le développement de la à partir d’une collection de boîtes d’allumettes Seita et la conversation entre les deux dessinateurs de la durant sa conception.
Boîtes d’allumettes Seita
Super Terrain propose l’entoure d’impressions riso qu’ils effectuent pour les flyers du Praticable. Un nouveau procédé d’impression et un nouveau format qui fait varier le temps de production d’un numéro vers une tactique au « coup par coup ».
fait fortune en vendant les espaces de sa bandelette pour des petites annonces.
« Un pour le prix de deux », c’est la promotion que propose Axel Benassis pour la , un caractère qui prévoit les altérations que le temps fait subir aux lettrages vinyle collés sur de nombreuses devantures.
N.02
Des traces de la provenance des bandelettes sont visibles, on distingue quelques hirondelles et autres traits de coupe aux extrémités du format.
Alex Chavot ouvre le premier numéro de la revue en citant les débuts de la nouvelle de Philip K.Dick Payez l’imprimeur. La lisibilité de la est éprouvée aux côtés d’étranges marques que l’on retrouve souvent dans les livres numérisés de Google Books…
N.01
Un premier deal est passé avec Francis Voisin de Média Graphic ; des bandelettes de 1 cm × 90 cm annoncent le début de la revue Payez l’imprimeur, un support qui sera mis à disposition de contributeurs pour éprouver et diffuser leurs caractères typographiques.
LA PERRUQUE [A] 8€* + livraison Comprend 6 numéros : N.01 – Alex Chavot N.09 – Alice Jauneau N.11 – Laurent Müller N.12 – Swiss Typefaces N.13 – Clément Le Tulle-Neyret + N.00 – La Perruque |
LA PERRUQUE [B] 8€* + livraison Comprend 6 numéros : N.14 – Derek Vogelpohl N.15 – Julien Vallet N.16 – Weiyi Li N.17 – David Jonathan Ross N.18 – Lucas Le Bihan + N.00 – La Perruque |
Les numéros 02, 03, 04, 05, 06, 07, 08 et 10 sont épuisés.
LA PERRUQUE [AB] 15€* + livraison Comprend 11 numéros : N.01 – Alex Chavot N.09 – Alice Jauneau N.11 – Laurent Müller N.12 – Swiss Typefaces N.13 – Clément Le Tulle-Neyret N.14 – Derek Vogelpohl N.15 – Julien Vallet N.16 – Weiyi Li N.17 – David Jonathan Ross N.18 – Lucas Le Bihan + N.00 – La Perruque |
Si vous ne souhaitez pas utiliser PayPal, écrivez-nous à bonjour@la-perruque.org et nous vous enverrons les informations concernant la livraison et le paiement. Si vous êtes à Bruxelles, arrangeons une livraison autour d'un café, ou d'une bière. *À l'occasion d'un workshop à La Cambre où La Perruque interrogeait l'économie de la typographie, il a été décidé que 1€ du prix de vente de la revue serait distribué à Julien Vallet, l'auteur du Mange-pierre (N.15), pour l'encourager symboliquement au développement de son caractère. Et bien oui, encourager la précarité ne coûte pas cher! |
LA PERRUQUE – ABONNEMENT (1 AN)
Commandez les numéros de la revue déjà parus (LA PERRUQUE [A], [B] ou [AB]) et recevez l'année prochaine ceux qui seront publiés en 2020 (± 4 numéros).
BOÎTE LA PERRUQUE [C] (collectionneurs) 250€ (5 exemplaires restants)
Comprend l'ensemble des numéros déjà publiés (y compris les numéros épuisés*), une planche offset 70 × 100 cm (pliée) avec un numéro de La Perruque imprimé dans ses marges, LA PERRUQUE [AB] (2 rouleaux), ainsi qu'un abonnement à vie : vous recevrez chaque année l'ensemble des derniers numéros parus.
N.01 – Alex Chavot *N.02 – Axel Benassis *N.03 – Raphaël Bastide *N.04 – Justin Bihan *N.05 – Jérémy Landes-Nones *N.06 – Large *N.07 – Collectif We.ch *N.08 – Benoît Bodhuin N.09 – Alice Jauneau *N.10 – Yoann Minet |
N.11 – Laurent Müller N.12 – Swiss Typefaces N.13 – Clément Le Tulle-Neyret N.14 – Derek Vogelpohl N.15 – Julien Vallet N.16 – Weiyi Li N.17 – David Jonathan Ross N.18 – Lucas Le Bihan + N.00 – La Perruque |
Contenu de la boîte La Perruque [C].
Les ventes de ces boîtes contribuent significativement au financement des conférences typographiques organisées tous les ans par la revue.
Ce premier lancement public articulera les intentions typographiques ou éditoriales des contributeurs invités pour ce temps de rencontre sous forme de discussion entre Raphaël Bastide, Axel Benassis, Justin Bihan et Alex Chavot, ainsi qu'avec l'intervention d'Olivier Lebrun. Cet échange témoignera aussi d'une autre facette du projet qui consiste à rendre visibles les dessous de la création d’un caractère. Aux sensibilités typographiques
La Perruque — Lancement #1 Jeudi 14 avril 2016 18h30 — temps de discussion puis vernissage — 22h
À l'atelier Bek Rue du Ruisseau 15 1080 Bruxelles
Contact T +32 484 30 65 93 M bonjour@la-perruque.org Facebook
Caractères (&) invités Axel Benassis (Lumette Vinyle) : Diplômé l’année dernière de l’EESAB – Rennes où il a notamment conçu l’exposition didactique de sa collection personnelle de boîtes d’allumettes : Graphisme & Philuménie, et pour laquelle il a conçu la famille de caractères Lumette. Il travaille aujourd’hui en freelance à Paris et poursuit ses projets auto-initiés. Raphaël Bastide (Steps Mono) : Acteur et ambassadeur de la culture du libre dans sa pratique du design graphique, de l’art et du code, il a initié et/ou participe aux projets : ofont, Velvetyne, OLA, Libre objet. Justin Bihan (VG5000 Modern) : Diplômé l’année dernière de l’EESAB – Rennes, il travaille en duo avec Chloé Bernhardt et dessine de nombreux caractères qui répondent aux projets qu’il initie, entre design et programmation. Alex Chavot (Grotex Micro) : Diplômé de l'ENSBA Lyon en 2014, il dessine des caractères pour des projets auto-initiés ou de commande. Il a notamment conçu le caractère identitaire de l'ENSBA Lyon et les quatre fontes de « base » de Prototypo avec Production Type. Il collabore aujourd'hui avec deValence. Olivier Lebrun, graphiste : Olivier Lebrun, graphiste, produit dans son travail et son enseignement des projets d’édition s’intéressant aux rapports qu’entretiennent contenant et contenus. Il est l’auteur de « Stolen Works of Art » (2010) et de « A Pocket Companion to Books from The Simpsons in Alphabetical Order » (Rollo Press, 2012). Depuis 2010 il poursuit le projet De Stihl avec Olivier Lellouche, où ils provoquent installations, éditions et questionnent les modes de production. Actuellement, il travaille avec Maria Jeglinska autour d’un projet de recherches sur les impressions clandestines en Pologne de 1976 à 1989, ainsi qu’à la publication d’une monographie de Bernard Chadebec avec Urs Lehni et Camille Pageard. Il enseigne à l’ENSBA Lyon et anime des workshops en France et à l'étranger.
Accès Métro : ligne 2 - 6 arrêts : Yser ou Ribaucourt ligne 1 - 5 arrêt Comte de Flandre Tram : 51 arrêts Yser, Sainctelette, Ribaucourt Bus : 45 - 58 - 88 - 89
Bar et petite restauration sur place
Une initiative d'Olivier Bertrand, avec le soutien de l'école de recherche graphique, les masters erg.edit et de typographie et les conférences du C.E. de l'erg. En collaboration avec l'atelier Bek.
Alex Chavot ouvre le premier numéro en citant les débuts de la nouvelle de Philip K.Dick Payez l’imprimeur. La lisibilité de la Grotex Micro est éprouvée aux côtés d’étranges marques que l’on retrouve souvent dans les livres numérisés de Google Books…
Le Grotex est inspiré par différents modèles de caractères sans serif européens du XXe siècle. Si son dessin se rapproche davantage des linéales géométriques que des premières grotesques, il est parsemé de touches humanistiques qui en font un caractère adapté au texte courant comme au titrage. Conçu comme une famille complète (en cours de développement), le Grotex a également été enrichi d’une version monospace.
Lorsque j’ai été contacté par La Perruque (anciennement Payez l'imprimeur) pour contribuer au premier numéro, j’y ai vu une opportunité de développer une version spécifique pour les très petits corps étant donné le format très étroit de la revue.
Je me suis penché sur différents caractères ayant fait leurs preuves dans ce domaine, pour en comprendre les spécificités. Je pense notamment aux grands classiques comme le Bell Centennial de Matthew Carter, mais aussi aux travaux plus récents comme le Minuscule de Thomas Huot-Marchand (lui-même inspiré des recherches de l’ophtalmologue Émile Javal) ou le Gemeli Micro de Jean-Baptiste Levée.
Annuaire téléphonique composé en Bell Centennial, Matthew Carter
Minuscule, Thomas Huot-Marchand
Entièrement redessiné avec des pièges à encre exagérés, les descendantes du Grotex Micro ont été raccourcies, les approches augmentées et la forme générale des caractères ont été modifiées mécaniquement pour être visuellement plus carrées, avec des contre-formes nettement évasées. Certains signes comme l’apostrophe, la virgule ou les guillemets anglais ont été simplifiés.
Ces distorsions délibérément flagrantes font du « Micro » le frère jumeau un peu tordu du Grotex. Si ces défauts sont perdus dans la masse d’un texte en 4 points, ils deviennent évidents lorsqu’on y regarde de plus près. Le design du Grotex Micro le rend donc parfaitement lisible dans les petits corps et tout à fait surprenant en titrage.
Plus qu’une création de caractère spécifique adaptée aux contraintes techniques d’un projet, il s’agit donc bien d’une adaptation, d’une sorte de détournement dont le déclencheur était la revue Payez l’Imprimeur, et le contexte une sorte d’interprétation directe du texte de Philip K. Dick : Pay for the printer. Le Grotex Micro devient, comme dans Pay for the printer, une sorte de copie dégénérative qui tente de simuler mais dont les défauts sont flagrants.
Pour le spécimen, j’ai choisi de présenter la typo dans plusieurs corps, révélant à la fois ses subtilités formelles et ses aptitudes en petits corps. De 30 points à 4 points, l’impact visuel se tarit, le texte se fait plus silencieux, ses forces s’amenuisent au fur et à mesure qu’il est envahi par de plus en plus de parasites tirés de Google Books. En effet, pour aborder cette question sous-tendue du simulacre, de la reproduction, de la copie et donc de la dégradation, j’ai collecté ces « traces » sur The Art Of Google Books, un tumblr (là encore, un médium bien représentatif de la copie, de la reproduction et de la redistribution propre à internet) répertoriant les accidents, erreurs, glitchs et autres coulisses de la vaste entreprise de numérisation du géant américain.
Ces images de mauvaise qualité, sorties de leur contexte sont donc imprimées ou griffonnées, scannées puis réimprimées à une échelle encore plus petite qui les porte presque au rang de poussières sur la page. La boucle est bouclée, ashes to ashes, dust to dust.
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« Un pour le prix de deux », c’est la promotion que propose Axel Benassis pour la Lumette Vinyle, un caractère qui prévoit les altérations que le temps fait subir aux lettrages vinyle collés sur de nombreuses devantures.
Suite à des recherches théoriques et graphiques autour des boîtes d’allumettes françaises du milieu du XXe siècle, j’ai dessiné un caractère typographique en lien avec ces imprimés éphémères.
Boîtes d’allumettes Seita
Ce caractère est un témoignage d’une période et d’une technique d’impression spécifique. Il s’agit donc d’une interprétation de ces lettrages imprimés en réserve et en petits corps grâce à la lithographie.
Lettres imprimées de la Lumette sur une jet d’encre
Je l’ai essentiellement éprouvé lors d’une exposition qui a eu lieu à l’école des beaux-arts de Rennes (EESAB), dans laquelle j’exposais l’ensemble de ma collection de boîtes d’allumettes. Elle a alors été sérigraphiée sur papier et sur mur à différentes échelles, ainsi qu’intégrée à un site internet présentant une sélection des boîtes : collection-seita.info.
Vue de l’exposition Graphisme & Philuménie, juin 2015
Éditions de Graphisme & Philuménie
collection-seita.info
Ici, il s’agit de corriger les défauts liés à l’impression de la Lumette en petits corps. En m’inspirant des travaux effectués par Matthew Carter ou encore Adrian Frutiger pour la lisibilité de la typographie, j’ai tenté de corriger les déformations dues à l’encre par le biais de pièges à encre. À l’inverse de la Bell-Centenial de Matthew Carter, j’ai dessiné des pièges à encre à l’extérieur de la lettre, car l’impression en réserve vient alors arrondir les fûts. Ces derniers ont aussi été élargis afin de compenser la présence de l’encre.
J’ai pu éprouver cette fonte au travers de différentes techniques d’impression à différents corps (jet d’encre, laser, sérigraphie et offset).
Détails du poster poster Sorg et Napoléon Maddox, Atelier Tout va bien, 2014
Par la suite, je me suis intéressé à adapter cette fonte à une autre contrainte, une autre technique : le découpage vinylique.
Au travers d’une recherche sur la lettre vinylique souvent présente sur les vitrines de magasins, et plus précisément sur les déformations induites par les intempéries, j’ai tenté une adaptation de la Lumette.
Dijon
Beaune (crédits : Anna Chevance)
La Roche-sur-Yon (crédits : Romuald Lay)
En constatant que ces déchirures interviennent suite à des tensions de la matière infligées par les intempéries, je me suis demandé ce qu’il se passerait si ces coupures étaient déjà prévues. Cela pourrait être une solution afin de corriger ces déformations et ainsi créer un lettrage pérenne.
Les nouvelles formes de ces lettrages les ont alors techniquement transformés en « stencil ». Les cassures sont disposées à des endroits assez improbables pour cette catégorie typographique, ce qui lui donne une particularité intéressante.
Découpe (crédits : Paul de Lanzac)
Pochoir (crédits : Paul de Lanzac)
Intempéries
Cette troisième fonte arrive dans la continuité des précédentes et vient interroger ces déformations sous un autre angle. Cette fois-ci, je ne cherchais pas à réaliser une forme qui peut perdurer, mais au contraire, une forme qui a la possibilité d’évoluer dans le temps, de se transformer. Les cassures se présentent comme des pièges à encre qui vont ainsi guider les déchirures dans le fût de la lettre. La graisse de la fonte a elle aussi évoluée, se rapprochant ainsi de la Nord de Roger Excoffon dessinée dans la même période que ces boîtes d’allumettes. D’ailleurs, ce caractère se retrouve assez souvent sur les vitrines et autres stops-trottoir de France.
Ces fontes font alors partie d’une seule et même famille, non pas définie par leur graisse ou leur style, mais par des fonctions allouées à une technique particulière. La forme de base de toutes ces expérimentations typographiques étant alors la Lumette, il est cependant envisageable d’adapter une multitude de caractères avec ces contraintes techniques et stylistiques.
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Raphaël Bastide fait fortune en vendant les espaces de sa bandelette pour des petites annonces.
Discussion entre les deux dessinateurs de la Steps Mono ; Raphaël Bastide et Jean-Baptiste Morizot, extraite du PDF présentant la timeline du développement de la Steps Mono.
R. — Salut Jean-Baptiste, je commence avec une série d’images de référence et des esquisses scannées. Je pense que partir sur une monospace pourrait être une bonne idée pour des questions de temps et de facilité de réappropriation. J’attends ton retour.
J-B. — Je serais d’avis de partir sur une monospace étroite si tu es d’accord. Aussi on pourrait s’amuser en essayant des inkstraps, des angles, des formes un peu brutes, etc. Je réfléchis un peu à ça et t’envoie une première fournée de glyphes bientôt.
R. — Je me demande quel peut être le statut d’une typo pixel à l’écran aujourd’hui. J’avoue préférer faire référence à l’unité pixel plutôt que de simuler du pixel. J’aime ces contrastes sur l’une de tes propositions, je trouve intéressante l’idée d’une monospace bien contrastée.
J-B. — Quelques propositions qui concernent les terminaisons, soit simples et nettes, soit angulaires qui produisent un effet arqué.
R. — J’aimerai faire une référence à la ponctuation dispropotionnée de Courier New. Qu’en penses-tu ? Ces tâches dans le gris de texte m’évoquent des décharges d’encre ou des erreurs d’affichage.
J-B. — Voici des propositions avec angles et courbes, j’ai une préférence pour les angles, question de contraste avec les pleins-déliés — Des essais de points sur /i aussi. Horizontaux ou verticaux.
R. — Je trouve aussi que les angles assumés rendent mieux. Pour moi ce /a est vraiment ce vers quoi j’aimerai que l’on parte — Je préfère les points de /i horizontaux — Des propositions de formes alternatives.
J-B. — J’ai développé un début d’alphabet pour tester l’ensemble. Test sur le /g — Biseaux sur les angles internes ?
R. —
R. — Que dirais-tu d’essayer de versionner la fonte avec Git et de synchroniser nos modifications ? Je pense que je vais me lancer dans le tracé d’une version Thin à partir de la Regular.
Structure du dépot
J-B. — Je viens de versionner le projet avec Git. Tu vas recevoir un Pull Request avec mes modifications. Plus de glyphes pour le code, accents, réglages divers.
Steps-mono.otf
R. —
Steps-mono-thin.otf
J-B. —
R. — Design de la triple page pour la publication sur étapes: tri des archives et préparation de la documentation pour les éventuels contributeurs sur https://github.com/raphaelbastide/steps-mono/
J-B. — + diacritiques, signes mathématiques et scientifiques...
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En citant la fin de la nouvelle Payez l’imprimeur, Justin Bihan répond à Alex Chavot et propose un retour à l’artisanat. Une drôle de pirouette pour éprouver un caractère issu des premiers ordinateurs ; le VG5000 (Modern). Ce numéro 4 est aussi le moment de dévoiler une étrange trame stochastique…
Le VG5000 est un caractère qui tire son nom du minitel homonyme.
Ses matrices et bases métriques sont issues du processeur vidéo qui affichait les caractères de cet ordinateur des années 80.
Le VG5000 a été (re)dessiné et interprété dans une optique multi-usage.
Au départ utilisé pour documenter des expérimentations, il est aujourd’hui testé comme interface graphique pour des logiciels spécifiques.
Le caractère original est construit dans une matrice de 8 points de largeur et 10 points de hauteur.
2 points sont alloués à chaque ascendante et descendante, 5 points à l’œil et 1 point à l’interligne.
Le VG5000 est lui construit sur une grille 4 fois plus détaillée, permettant ainsi plus de libertés dans le dessin et l’ajustement des courbes, même si cette contrainte force une uniformisation et une simplification des lettres.
L’exercice principal a consisté à donner du corps à ces caractères bitmap en tentant de trouver des courbes là où il n’y avait que des angles.
C’est lors cette recherche formelle et en travaillant avec des calques superposés que le VG5000 s’est en quelque sorte « fondu » à la matrice de départ, révélant des aspects inattendus, et offrant une forme mi-bitmap, mi-courbée.
Ces angles visibles et radicaux sont des vestiges des premières fontes numériques.
Une des particularités du caractère original conservé par le VG5000 concerne les accents : ceux-ci sont toujours placés à la même hauteur (quelle que soit la casse) forçant ainsi certaines lettres capitales à s’écraser.
Pour enrichir le VG5000, de nombreux glyphes et pictogrammes complètent la collection préexistante.
Ils sont créés au gré des besoins et des usages.
Le VG5000 sera bientôt disponible sous licence libre afin qu’il puisse vivre dans d’autres contextes.
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Jérémy Landes-Nones pousse le Millimetre aux limites de ses possibilités en l'éprouvant sur ce qui pourrait être une mire d'impression, tout en cadence.
Millimetre est une famille typographique basée sur le système métrique et distribuée par Velvetyne Type Foundry. Pour sa sortie, j’ai demandé à quelques graphistes et dessinateurs de créer des posters utilisant et montrant différentes facettes de la typo. Une typographie n’est rien tant qu’elle n’est pas utilisée. Cet exercice lui a donné une âme. Une soirée de lancement a été l’occasion d’exposer ces posters. Cependant, Olivier m’a proposé de contribuer à la Perruque avant le lancement et donc avant que la typo soit finalisée. La version présente sur ma Perruque correspond donc à une étape de travail du caractère, elle montre quelques divergences avec la version actuellement distribuée. Les principales différences peuvent être vues dans le dessin du a minuscule et la largeur de l’espace entre les mots, ces deux détails influençant nettement le rythme et le gris du texte. De nouvelles versions (graisses supplémentaires) sont en cours de dessin, ce qui permet de prendre du recul et de requestionner certains choix faits dans les deux premières graisses.
Le Millimetre suit la logique décimale du système métrique. Dans cet esprit, lorsque vous composerez un texte en Millimetre, s’il vous plaît n’utilisez pas l’unité archaïque du point. Pensez plutôt à ces unités modernes et cohérentes que sont le millimètre, le centimètre, le décimètre ou le mètre lui-même, pour les très grandes tailles. Le point est apparu avant le système métrique. Il a été créé spécifiquement pour mesurer la taille des caractères dans l’imprimerie et sa valeur a évolué à travers les siècles. Avant le mètre, chaque aspect du monde avait sa propre unité de mesure, sans aucune correspondance entre ces différentes unités. L’once, le point, le pied, la lieue, le pouce, autant d’ordres de grandeur différents à travers lesquels voir le monde. Avec l’apparition du système métrique à la fin du XVIIIe siècle (devenu Système international par la suite), la volonté est apparue de pouvoir mesurer l’ensemble des aspects du monde avec un système unique. Du micromètre, à l’hectolitre en passant par la mole, le milligramme, l’ampère ou le kelvin, on construit une image cohérente du monde physique. 1 kilogramme d’eau, 1 décimètre cubique d’eau, 1 litre d’eau, autant de manières de dire la même réalité sous deux angles différents : la masse, et le volume, exprimé selon deux unités. Le Millimetre se place dans cet héritage universaliste, utilisable du micron au kilomètre, pour les domaines de la science moléculaire ou de l’automobile, il vise à embrasser le monde et n’est pas cantonné au monde du livre qui a vu naître le point.
Dans cette typographie, chaque cadratin (un carré de la hauteur du corps) est divisé verticalement et horizontalement en 10 unités (le système décimal, dac ?). Imprimé à un corps de 1 cm, les fûts du regular feront 1 millimètre d’épaisseur. Autant les espaces blancs que les fûts ou traverses se calent sur cette grille. La moitié des lignes et la moitié des colonnes de cette grille de 10 × 10 sont prévus pour recevoir les fûts, les courbes et les traverses de la fonte alors que l’autre moitié est prévu pour recevoir les espaces blancs intérieurs aux lettres et entrent-elles, ce qui rend le rythme du Millimetre unique et totalement réglé, comme un code barre. Pour être encore plus clair, quand on écrit deux m bas-de-casse, l’épaisseur des fûts des m sera égale à celle des contre-formes entre ses jambes, à celle des courbes et à l’espace entre les deux lettres. Ce dessin contraint, aligné sur une grille pixellaire, permet au Millimetre de fonctionner décemment à l’écran. Quand on compose du texte avec un interlignage égal à la hauteur du corps, la grille apparait dans l’alignement parfait des fûts entre les différentes lignes de texte. Pas besoin d’artifices ni de corrections.
D’un point de vue stylistique, Millimetre est une linéale construite et géométrique, aux proportions relativement larges même si la structure de certaines lettres pourrait contredire cette généralité. Avec son aspect rectangulaire et ses terminaisons fermées, Millimetre rappelle les linéales des années 60 comme l’Eurostile d’Aldo Novarese. N’essayant pas de fuir cet univers graphique, cette typographie embrasse les connotations rétrofuturistes, architecturales, technologiques et sciences fictionnelles qui l’accompagnent. À cause de la grille sur laquelle elle est construite, le rythme de cette fonte peut rappeler celui créer par une monospace. Même s’il partage avec cette famille typographique une certaine régularité dans les largeurs de ses glyphes, Millimetre n’est pas une monospace, elle crée son propre gris typo. Si le dessin de cette famille a été commencé sur une base purement monolinéaire, il s’en est finalement éloigné pour devenir plus subtil, avec des jointures plus fines et de petites variations de graisses qui apportent de l’équilibre aux formes. Cela devient évident dans les versions plus grasses du Millimetre où la création de déliés a été nécessaire pour le dessin de certains glyphes, évitant ainsi qu’ils n’apparaissent trop gras comparés au reste de la fonte.
Si le regular ne quitte jamais la grille, les autres graisses s’en éloignent pour gagner en sensibilité tout en gardant leurs rythmes les plus proches possible. Le bold est 1,5 fois plus gras que le regular quand le light aura lui une graisse égale à la moitié celle du regular. Composées ensemble, ces différentes graisses partagent la même grille, ce qui permet de créer des mises en pages très construites et maitrisées. Le système n’abandonne jamais jamais. Lors du lancement, j’ai demandé au public de voter pour la version qu’il souhaiterait me voir dessiner en priorité. Le light a fini bien premier et est donc maintenant en phase de finalisation pour sa sortie prochaine. Le black, bon second, est quant à lui déjà bien commencé.
Enfin, cette famille est accompagnée d’un bel ensemble d’ornements géométriques permettant de créer des motifs dialoguant avec le gris du texte. Ces ornements sont inspirés par les débuts de l’ère informatique et par les mires utilisées dans l’imprimerie. Ils seront utiles pour la création de documents techniques, de cartes ou pour mettre l’emphase sur la dimension technologique de ces documents graphiques.
Millimetre est une famille typographique libre et open-source encore en développement. Téléchargez-la chez Velvetyne ou contribuez sur github.
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À la manière du tapis d’usine dont le déroulement ininterrompu assujetti l’ouvrier à sa tâche, chaque espace blanc de cette perruque marque l’opportunité d’un moment d’évasion, de réflexion. Les termes du « perruquier » se mêlent au vocabulaire technique de l’ouvrier, inversant ainsi tour à tour les rôles. Ces micro-espaces sont des lieux d’opportunités que l’ouvrier s’octroie pour se libérer de l’injonction de son travail, autant d’instants pour « perruquer » sur le tapis roulant que le Kreuz a jalonné de boulons et d’écrous.
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Entre quelques coups de tatanes bien placés et d’autres redoutables uppercuts, la Savate, habile, réussira toujours à sortir des cordes indemne ! Le Collectif We.ch nous régale ici d’un show-spécimen haut en couleur qui, en plus d’être le premier numéro de la Perruque à utiliser la quadrichromie, est aussi le premier numéro à expérimenter l’image dans cet espace aussi étroit d’un centimètre de haut.
Le point de départ de la Savate est un lettrage peint à la main sur le mur d’une rue à Ivry-sur-Seine.
La première version de la Savate était une simple numérisation du lettrage, complétée pour avoir un alphabet complet.
Le résultat laissait à désirer : les tracés étaient trop angulaires et les graisses placées de manière trop aléatoire. Ces défauts ont été peu a peu corrigés par des étapes de redessins et la Savate à gagné en souplesse.
Après les capitales, il a fallu inventer les bas de casse et les chiffres. Là aussi, pas mal d’essais et de versions différentes ont été nécessaires pour décider de la forme des caractères, étant donné le peu de références typographiques directes sur lesquelles se baser.
Après avoir hésité sur le placement des graisses pendant un certain temps, on a fini par s’éloigner des contrastes du lettrage initial pour choisir des contrastes inversés plus radicaux ; ce qui a permis d’homogénéiser le caractère.
Pour l’italique, une version penchée du caractère romain a fournie la base, puis les courbes ont été retravaillées et certains glyphes remplacés par des versions plus cursives.
Si le caractère final a peu de rapport avec la source d’inspiration, on a tenu à garder la référence aux arts martiaux, notamment par son nom.
Pour continuer de jouer avec cet univers, on a dessiné une série de pictogrammes autour de la boxe.
La Savate à été dessinée sans but précis, surtout pour le plaisir et aussi comme un exercice (ou comme un échauffement). Une distribution commerciale n’a jamais été vraiment envisagée et il nous semblait logique de distribuer ce caractère étrange chez VTF.
Chez VTF, le libre n’est pas juste un mode de distribution, mais aussi un parti-pris créatif ; les caractères de VTF sont souvent expérimentaux, un peu bizarres ou peu lisibles. C’est un espace qui nous semblait approprié pour la Savate et nous avons donc pris contact avec eux. Le caractère leur a plu et il fait maintenant partie du catalogue singulier de VTF.
La Savate n’a pas dit son dernier mot ; on travaille en ce moment à élargir la famille avec une version poids plume, plus adaptée et endurante pour supporter un texte courant.
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Crac boum ! Le bb-book débarque tonitruant sur le N.08 de La Perruque ! Un numéro aussi contrasté et expressif que l’est ce caractère décomplexé.
1. Variantes du bb-book A : du light au bold, du condensed à l'extra-extended, à chaque graisse son caractère
2. Des contreformes capricieuses et rebondies en pleine discussion avec l'extérieur du contour de la lettre, calme et droit dans ses bottes
3. Du fort au léger contraste, du light au bold, du filiforme à l'encombrant !
4. Pièges
5. De l'empattement discret jusqu'au grand bavard
6. Répartition contrariée des pleins et déliés
7. Interpolation «inversée» : par les styles médians
8. Et bien plus de bizarreries !
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Alice Jauneau met en scène les lettres « découpées à jour » du Graduel dans un spécimen-éclipse qui ne révèle son contenu sur papier imprimé qu'à condition de l'exposer à la lumière. ☾ ☼
Graduel est une famille de caractères typographiques qui interroge la pratique du pochoir lié à un contexte précis, celui des premiers caractères pochoirs destinés à la composition d’ouvrages imprimés. Cette création explore les spécificités de lettres dont la forme singulière porte la trace de l’outil qui les a reproduites.
Pages du Graduel de Notre-Dame de Paris, livre de chœur peint par Compardel et écrit par Jean Fossard, 1669–1680, Paris.
Graduel est nommé ainsi en référence à l’ouvrage duquel il provient; Le Graduel de Notre-Dame de Paris (1669–1680). Cet ouvrage liturgique aux dimensions particulières (80 × 57 cm fermé) était destiné au chant en groupe, il était placé en hauteur dans le chœur de l’église afin que l’ensemble des choristes puissent le lire. Le texte est composé avec deux tailles de corps de pochoirs.
Comme le suggère le terme Graduel, cette famille de caractères dont les lettres sont « découpées à jour », pour reprendre l’expression de Gilles Filleau Des Billettes, apporte au texte une lumière progressive. De cette manière, Le Graduel se compose de trois graisses : Sirius, Denebola et Rastaban.
La plaque du pochoir est doté de tenons qui servent à retenir les contreformes et deviennent, une fois pochées, des liens invisibles entre les pleins de la lettre. Ainsi, Sirius se distingue des autres graisses par les spécificités formelles typiques de l’outil qui a servi à composer le Graduel de Notre-Dame. Les lettres sont traversées par la lumière lorsqu’elles sont à l’état de pochoirs et elles apportent (par inversion) de la lumière dans le texte une fois poché en noir sur le blanc du papier, grâce aux ouvertures dans leurs silhouettes.
Composé en Graduel Sirius, texte issu de l’article ”The description of stencilling by Gilles Filleau des Billettes: transcription and translation”, Eric Kindel, Typography papers, n° 9, 2014.
Détails du Graduel de Notre-Dame de Paris.
Le dessin du Graduel Denebola est le plus fidèle au caractère source du Graduel de Notre Dame de Paris. On distingue certaines particularités structurelles liées à la fabrication du pochoir. Ces déliés extrêmement fins, par exemple, résultent d’une contrainte technique. En effet, contrairement à l’impression typographique, qui a tendance à graisser le caractère par les effets conjoints de l’encrage et de la pression, le caractère poché sera plus fin que la forme découpée sur la plaque. Ce phénomène est dû à l’épaisseur de la plaque en métal qui contraint la forme finale à un amaigrissement. Une fois pochées, les lettres étaient parfois retouchées par le script à l’aide d’une fine plume afin de fermer l’œil de la lettre.
Composé en Graduel Sirius, texte issu de l’article d'Eric Kindel, op. cit.
Détails du Graduel de Notre-Dame de Paris.
Enfin, Rastaban se destine à la composition de textes plus long, c’est le style le plus sombre du Graduel. Son dessin découle de l’étude des différences entre les deux tailles de corps de pochoirs présentes dans le Graduel de Notre-Dame de Paris. On constate principalement que le contraste est moins marqué entre les pleins et les déliés.
Sirus, Denebola et Rastaban se distinguent non pas par variation de graisse, comme c’est le plus commun dans une famille de caractères, mais par la lumière que chaque style renvoie dans le texte composé. Du caractère de labeur, Rastaban, à celui de titrage, Sirius, le caractère s’ouvre, jouant sur un contraste évident entre l’ombre et la lumière.
Composé en Graduel Rastaban, texte issu de l’article d'Eric Kindel, op. cit.
Détails du Graduel de Notre-Dame de Paris.
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Le spécimen du Petite mort est un jeu d’osselets typographiques qui danse sur la tombe de ses plus illustres ancêtres. Memento mori. À l’occasion du dixième numéro de La Perruque, Yoann Minet propose l’accès au Petite mort qu’il a dessiné spécialement pour sa contribution à la revue. Et comme chez La Perruque l’occasion fait le larron, qui dit numéro spécial dit offre spéciale ! Il vous est donc possible de télécharger gratuitement le Petite mort si vous disposez déjà du CODE PROMO figurant sur le N.10 de la revue imprimée. Si ce n’est pas le cas, vous pourrez le télécharger après avoir commandé ici les numéros de La Perruque à prix libre !
Le Petite mort est une police de caractère dessinée spécialement pour répondre à l’invitation de La Perruque à contribuer à son dixième numéro. En m’inspirant de la méthode d’impression de la revue qui l’oblige à adopter un format si particulier de 1 × 90 cm, je me suis demandé comment créer une police à partir d’un spécimen (et non l’inverse) ? Pour cela j’ai choisi d’adapter l’un de mes caractères pour une composition en très petit corps, propice à ce format extra-mince.
Totentanz Regular / Petite mort Regular.
Le Petite mort est donc une version pour petit corps de la version Regular du Totentanz. Ce dernier s’inspire des gravures lapidaires trouvées dans les catacombes et les cimetières de Paris. Construit sur une base de Didot, son dessin robuste redonne de la force et de la dureté à ce style qui, au fil de l’histoire, s’est défini comme fin et délicat. Cette perception des didots est liée à leur usage récurrent dans le monde de la mode et du luxe.
Gravure lapidaire, catacombes de Paris.
Si l’on remarque que les Didots sont caractérisés par un dessin rigoureux et construit autour d’un axe vertical, s’éloignant ainsi des conventions calligraphiques, ce n’est pas le cas des italiques de ces styles qui restent la plupart du temps fortement marquées par le délié du geste calligraphique. Pour s’éloigner de cette spécificité, les versions Slanted et Backslanted du Totentanz sont des expérimentations formelles qui préfèrent une construction plus brutaliste.
Totentanz, Yoann Minet, 2016.
Totentanz est la traduction allemande de « Danse macabre ». Le caractère fait ainsi référence à un certain art macabre du Moyen Âge qui met en scène la mort au côté de divers personnages de classes sociales différentes. Le message est simple : la mort se moque des distinctions sociales.
Images et textes issues de clichés composites de la fonderie Haas et distribués vers le milieu du XIXe siècle. Inspirés de gravure sur cuivre de Mathieu Mérian l’Ancien, créés à partir de la fameuse Basler Totentanz (c.1440).
Adapté pour être composé en tout petit corps et conserver une forte lisibilité, le dessin du Petite mort est encore plus radical que son prédécesseur : les chasses sont plus larges, les formes plus ouvertes et on y trouve de francs pièges à encre.
Totentanz Regular / Petite mort Regular.
Mais soyons sincère, les polices conçues pour des petits corps et qui possèdent de si grandes caractéristiques formelles sont le plus souvent utilisées à grande échelle pour leur présence graphique. Partant de ce postulat, le Petite mort est autant conçu comme un caractère Display que comme un caractère répondant à des contraintes de lecture à petite échelle. Il s’agit avant tout d’un exercice de style où l'on se fait plaisir; moi en la créant et je l’espère vous en l’utilisant !
Totentanz Regular / Petite mort Regular.
Ce spécimen est aussi l’occasion d’expérimenter un moyen de distribution aussi étroitement lié à la revue imprimée que l’a été la conception du Petite mort. Pour cela, l’occasion du dixième numéro de La Perruque fait le larron : qui dit numéro spécial dit offre spéciale !
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Pour présenter son caractère, Laurent Müller écrit une « déclassification » typographique et poétique qui hybride les formes et les genres. En faisant cohabiter les différences plutôt qu'en les catégorisant, le spécimen de l'Arcturus désamorce une certaine histoire de la querelle typographique et propose un jeu de langage réconciliateur.
Si pour certains les règles sont faites pour être transgressées, les classifications sont selon moi faites pour être déjouées. Il est intéressant d’observer que bien que la plupart d’entre elles servent à mettre en lumière les différences, elles regroupent par la même occasion les similitudes. À l'image de certaines frontières perméables, les classifications devraient permettre en un court instant de mixer les origines.
Dans la perspective contemporaine d’une expansion du champ de la typographie (par le biais d'outils numériques toujours plus accessibles), il serait intéressant de questionner à nouveau les frontières qui séparent les grandes familles de caractères que les classifications restées célèbres ont ancrées dans nos pratiques typographiques.
L'une des dernières tentatives de classification à proprement parler fut celle de Jean Alessandrini avec son Codex 1980, publié en 1979 dans la revue française Communication & Langages.
Extraits du Codex 1980, Jean Alessandrini, in Communications & Langages, n° 43, 1979.
Comme à l’habitude typographique, ce papier suscita une querelle avec nombre de ses confrères par lettres interposées. Dans sa contribution, Fernand Baudin finira tout de même par relativiser : « À temps nouveau, classification nouvelle. Tout passe “en ce monde-cy transitoire.” Mais ce n'est pas nous qui fixons les dates. »
En contrepoint de cette querelle, la famille Arcturus est née en 2017 d'une union entre Cochin, Jenson et Slimbach. Son aîné, le a, est le seul issu d'une hybridation.
La famille s'est par la suite agrandie naturellement et a évolué indépendamment jusqu'à s'en émanciper totalement. Elle finira par obtenir une double nationalité grâce au métissage de ses empattements, fruits d'une synthèse entre ductus et forme construite.
Extraits du Codex 1980, Jean Alessandrini, op. cit.
« Speedball Textbook », 22e édition, Sheila Waters, 1991, p. 19.
« En un geste elle prend deux sens », construction d'un empattement de l'Arcturus.
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Pour ses phases de tests, Swiss Typefaces profite de La Perruque pour propulser à haute vitesse la fonte expérimentale KOPYME tout le long du spécimen… Dynamique, puissante, elle raconte l’histoire d’un ultime rush.
KOPYME est une fonte brutale avec des caractères monolinéaires monospaces et des proportions extra-larges. En mettant l’accent sur les horizontales étendues, elle fait référence à une tradition de lettrage spécifiquement suisse qui renvoie aux œuvres de Walter Käch dans les années 1930 et 1940, et qui est aussi matérialisée dans la police Haas Horizontal du designer de l’Helvetica Max Miedinger.
Dans une variation futuriste de ce thème, Swiss Typefaces introduit des formes lourdes et troublantes avec des terminaisons angulaires, comme sur le ‘C’ ou le ‘S’. L’horizontalité de KOPYME est compensée par des diagonales qui traversent l’espace du glyphe comme des faisceaux laser. Dans des lettres comme ‘M’ ou ‘Y’, elles traversent la ligne de base augmentant ainsi l’énergie cinétique de la police. Encore en développement, le caractère est uniquement composé de majuscules et vient dans un seul style: KOPYME, As Usual.
Texte : Florian Hardwig
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En s’intéressant de près à l’infra-mince, le collage des extraits choisis par Clément Le Tulle-Neyret dans le treizième numéro de La Perruque formule une riposte au célèbre adage de Beatrice Warde concernant la typographie en général : « Printing should be invisible ». Avec l’affirmation d’infimes choix partiaux et subjectifs logés dans les deux versions de son caractère, l’Immortel Infra et Acedia, il n’est plus question de ce qui n’est pas visible, mais de ce qui est quasi-invisible.
« Le voir précède le mot. L’enfant regarde et reconnaît bien avant de pouvoir parler. Mais le voir précède également le mot en ce sens que c’est en effet la vue qui marque notre place dans le monde : les mots nous disent le monde mais les mots ne peuvent pas défaire ce monde qui les fait. Le rapport entre ce que nous voyons et ce que nous savons n’est jamais fixé une fois pour toutes. Tous les soirs nous voyons le soleil se coucher. Nous savons que la terre tourne autour de lui. Toutefois la connaissance, l’explication ne correspondent jamais tout à fait à la vue. »[1]
Puisque la vue d’un texte précède sa lecture, comment la forme des lettres peut-elle servir un propos ? Comment retranscrire visuellement un contenu en-dehors de sa mise en page ? Un caractère typographique peut-il incarner un texte en particulier ? Ce projet a été l’occasion de s’interroger sur l’architecture « établie » – par graisses ou par chasses – d’une famille de caractères typographiques. Quelles autres filiations peuvent-être donc imaginées entres les différentes fontes qui la composent ? Cette large problématique découle d’une réflexion sur les formes que peut revêtir l’italique : envisager différentes pentes pour prendre en charge différents niveaux de hiérarchie dans le texte. Ainsi la création de variantes – par l’habit de la lettre plutôt que par son squelette – a remplacé celle de graisses, permettant alors d’attribuer des rôles éditoriaux à chaque variante plutôt que de supposer utile et nécessaire de produire différentes graisses sans questionner leurs statuts.
[Fig. 1] Robert Granjon, Petit Romain Italique « Immortelle », 1559. Source : Lodovico Domenichi, Facecies, Lyon, 1559 © Musée Plantin-Moretus, Anvers.
Le style initial, nommé Immortel[2] Infra[3], est une garalde dense, avec des glyphes dessinés plus fins ou au contraire plus noirs que les lettres bas-de-casse. Né d’un intérêt pour le travail de Robert Granjon (1513–16 novembre 1589), et en particulier pour son caractère Cicéro (ou Gros Cicéro) gravé en 1569, il est conceptuellement lié au texte de Georges Perec, L’Infra-ordinaire[4], dans lequel il est question de choses conventionnelles, banales, ordinaires tellement ancrées dans le quotidien qu’elles en deviennent oubliées, qu’elles ne sont plus regardées.
[Fig. 2] Robert Granjon, Cicero gros œil Numero XXXIV « Gros Cicéro », 1569 ; ici imprimé en 1905, comprenant un « a » minuscule probablement gravé au XVIIIe siècle par Johan Michael Smit (on notera que certains « ç » sont également différents : il est probable que celui de « poinçons », 7e ligne en partant du haut, provienne de la même fonte que le « a » de Johan Michael Smit ; tandis que celui dans « poinçons », 9e ligne en partant du haut, provient certainement de la main de Granjon). Dans cet ouvrage se cachent quelques « a » bas-de-casse originels, gravés par Robert Granjon. Source : Max Rooses, Index characterum architypographiae Plantinianae, Anvers, 1905 © Musée Plantin-Moretus, Anvers.
Le terme d’inframince inventé par Marcel Duchamp entre 1935 et 1945, qu’il définit comme l’art de l’imperceptible, l’écart subtil et la différence infime, a également été une source d’inspiration. L’une des formules qui représente parfaitement ce dont il est question est écrit dans la note 12 de Marcel Duchamp : « Séparation infra mince entre le bruit de détonation d’un fusil (très proche) et l’apparition de la marque de la balle sur la cible (distance maximum 3 à 4 mètres.- Tir de foire)[5]. » L’inframince, c’est l’espace qui existe entre les gouttes d’une pluie torrentielle. L’espace infime entre deux moments tellement proches dans le temps qu’ils paraissent a priori collés entre eux. L’inframince, c’est le moment où un élément subtil, quasi invisible, échappe au regard de l’être humain. C’est la différence entre deux éléments a priori identiques.
Partant de Robert Granjon et de la typographie du XVIe siècle, cela renvoie directement à la matérialité de la lettre : le plomb. En liant ce caractère à des concepts contemporain (infra-ordinaire, inframince), cela permet de parler de la matérialité du texte, de la vision que l’on a d’un bloc de texte avant d’en entamer la lecture.
Ce caractère étant prévu pour un usage au quotidien (tout ce qui concerne une lecture linéaire et immersive), il est nécessaire d’arriver à un dessin suffisamment calme pour être lisible sans fatiguer l’œil – « La recherche de la beauté ne doit donc jamais s’exercer aux dépens de la lisibilité »[6] – tout en ayant une présence et une couleur générale plutôt sombre. Sombre pour deux raisons. La première, née d’un intérêt personnel pour la noirceur du texte – et pensant intuitivement que la densité du bloc est un moyen d’empêcher l’œil du lecteur de s’évader du texte ; la seconde, comme une affirmation de la première, car les textes sont plus lisibles dans des caractères sombres plutôt que clairs. En effet, selon Allen Hutt : « […] si Morison pouvait à bon droit affirmer en 1932 que le Times Roman n’était ‹ pas uniquement lisible dans de bonne condition d’éclairage mais également dans de mauvaises › cela n’est plus vrai. En 1970 il suffit de comparer l’aspect maigre et gris du texte du Times – alors qu’il est pour l’essentiel composé en corps 9 – avec l’apparence beaucoup plus dense et noire du Linotype Modern dans le Daily Telegraph – principalement composé en corps 8 – pour reconnaître lequel est le plus lisible. »[7] À propos de la couleur d’un caractère, Fred Smeijers ajoute également que « a little too bold is better than a little too thin »[8].
Si certains des glyphes de l’Immortel Infra suivent d’assez près le caractère Gros Cicéro de Granjon – comme le point d’interrogation, où j’ai voulu conserver le geste manuel par la trace de la plume plate –, d’autres s’en éloignent – comme le G majuscule dépourvu de spur, ou encore le P majuscule où la panse vient fermer la contreforme.
[Fig. 3 ligne du haut] Robert Granjon, Cicero gros œil Numero XXXIV « Gros Cicéro », 1569. Source : Hendrik D. L. Vervliet, French Renaissance Printing Types, A Conspectus, New Castle, Oak Knoll Press, 2010. [Fig. 3 ligne du bas] Échantillon du caractère typographique Immortel Infra. Caractère typographique et design de l’auteur.
Lors de mes premières recherches, le travail d’autres graveurs m’a intéressé, notamment celui de Pierre Haultin (environ 1510–1578), considéré comme le premier à graver des caractères en très petit corps. Il grava une Grosse Nompareille et une Petite Nompareille pour l’impression de la Bible en français en 1567 pour du format de poche[9], et ses caractères de petite taille furent utilisés jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.[10] En les observant de près, il m’a paru intéressant d’inclure certaines de leurs caractéristiques afin d’aller dans le sens des petits corps, et logiquement d’éléments aidant à une composition serrée ; comme le positionnement vertical de l’apostrophe [Fig. 4] qui, dans la plupart des caractère d’Haultin, est relativement basse.
[Fig. 4] Pierre Haultin, Gros-romain, 1569. Source : Hendrik D. L. Vervliet, French Renaissance Printing Types, A Conspectus, New Castle, Oak Knoll Press, 2010.
Pour évoquer L’infra-ordinaire de Georges Perec et l’inframince de Marcel Duchamp, certains glyphes sont donc dessinés plus ou moins noirs que les lettres bas-de-casse. Dans la [Fig. 5], la première ligne montre certains glyphes de ponctuation dessinés assez sombres – ceux principalement composés de points –, tandis que la seconde ligne montre des glyphes plus fins, traités de manière mono-linéaire. Cela permet d’obtenir quelques inflexions de rythme au sein du paragraphe. Si les lettres suivent un schéma plutôt classique, les autres éléments (la ponctuation et les symboles mathématiques) ont une couleur particulière, ce qui permet de parler, de montrer et de mettre subtilement en exergue les signes permettant de composer une phrase. Afin d’aller dans ce sens, les lettres capitales sont également légèrement plus sombres que ce qu’il est conventionnellement admis.
[Fig. 5, 6] Échantillon du caractère typographique Immortel Infra. Caractère typographique et design de l’auteur.
En observant le travail de Robert Granjon, il apparaît que les italiques qu’il a gravés n’avaient pas toutes les mêmes pentes, ce qui influe considérablement sur le rythme du texte.
[Fig. 7a, b] Robert Granjon, Texte Cursive, 1562 ; Robert Granjon, Mediane Cursive Droite, 1565. Source : Christophe Plantin, Folio Specimen, Antwerp, c. 1585 © Musée Plantin-Moretus, Anvers.
De ce constat est né l’envie de dessiner deux italiques, chacune destinée à un rôle éditorial précis : l’une, faiblement penchée, pourrait être adaptée à la composition de textes longs – comme une manière de revenir aux sources avec la première italique gravée par Francesco Griffo pour Alde Manuce entre 1499 et 1501 [Fig. 8] ; l’autre, fortement penchée, pourrait être adaptée à la mise en exergue d’éléments – mots étrangers, titres, notions… – comme il est désormais d’usage de le faire.
[Fig. 8] Virgile, Martialis, Alde Manuce, Venise, 1501. Source : © Bibliothèque de l’école Estienne, Paris.
Il y a logiquement des différences de pentes, mais dans la mesure où l’italique de composition est un entre-deux, elle vient tirer parti de la stabilité du romain et de la cursivité de l’italique de mise en exergue. [Fig. 9] Par ailleurs, l’italique de composition devant tenir sur la longueur, certaines formes et pentes sont communes à plusieurs lettres, là où l’italique de mise en exergue se permet beaucoup de libertés, visibles également dans les différences de pentes des lettres. L’idée derrière cette italique marquée est de pouvoir la combiner à la fois avec le romain, mais également avec l’italique de composition.
[Fig. 9, 10] Échantillon du caractère typographique Immortel Infra Romain, Italique de composition et Italique de mise en exergue. Caractère typographique et design de l’auteur.
Du dessin de cette première fonte (Infra) découle la seconde, nommée Immortel Acedia[11] et née de la lecture d’une partie de la thèse de Constantin Zaharia[12], « Dürer et le nouveau symbolisme de la mélancolie », concernant l’œuvre Melencolia I d’Albrecht Dürer réalisée en 1514, d’une importance considérable dans l’histoire de l’art car traitant le sujet de la mélancolie d’une manière tout à fait inédite.
[Fig. 11] Albrecht Dürer, Melencholia I, 1514. Source : Wikipédia, fr.
Afin de l’inscrire dans une série de variantes, Immortel Acedia fait exactement la même chasse qu’Immortel Infra, introduisant ainsi le multiplexage comme la charpente des autres caractères de la famille qui se dessinent.
[Fig. 12] Échantillon des caractères typographiques Immortel Infra et Acedia. Caractères typographiques et design de l’auteur.
Dans cette œuvre de Dürer, beaucoup d’éléments font appel à l’entre-deux, une notion qui m’a particulièrement inspirée : « Mélancolie [écrit avec un M majuscule représente le personnage féminin/masculin de la gravure, mélancolie sans majuscule initiale représente l’état de l’être humain], au contraire, se trouve dans un état, pour ainsi dire, de super-éveil, et son regard fixe est celui de la quête intellectuelle, intense bien que stérile. Elle a suspendu son travail non par indolence, mais parce que ce travail est devenu, à ses yeux, privé de sens. »[13] La lumière intermédiaire, la « brune », empêche le spectateur de définir l’heure précise de la journée et ne tient pas particulièrement aux conditions naturelles d’une certaine heure du jour : « elle indique la brune inquiétante de l’esprit qui ne peut ni rejeter ses pensées dans l’ombre, ni les ‹ amener à la lumière ›. »[14]
Partant de ce constat, j’ai envisagé le dessin et la construction des lettres de ce caractère comme un entre-deux. Dans l’histoire de la typographie, il est aisé de se référer à la catégorie des caractères transitionnels dans la classification Vox-ATypI. Or, comme l’écrit Muriel Pic, « il [l’homme mélancolique] affiche son refus du temps conventionnellement établi à partir de fuseaux horaires […] ; il s’oppose au temps de l’histoire et à sa chronologie avec un « avant » et un « après » qui favorisent l’oubli de la destruction […] ».[15] La trace de l’outil semble donc plus juste comme point de départ pour le dessin de la fonte Immortel Acedia, notamment si l’on observe de plus près la gravure de Dürer, où « les outils qui traînent aux pieds de Mélancolie signifient l’art et la science, qui permettent de mesurer, de tracer, de polir des surfaces, mais aussi de créer ce que représente la faculté imaginative. Dans l’état d’abandon où ils se trouvent, il y a comme un manque d’unité et de cohérence, une absence quasiment totale de sens ».[16] Un manque de cohérence qu’il semble intéressant de questionner pour tenter de réconcilier, d’unifier et d’harmoniser deux approches différentes du tracé : en suivant la théorie de Gerrit Noordzij, comment pourrait-on alors créer un caractère en partant des traces laissées à la fois par la plume plate d’un côté, et la plume pointue de l’autre ?
[Fig. 13] Gerrit Noordzij, tracés en translation et en expansion. Source : Pinterest.
La construction de chacune des lettres se base sur cette question simple : l’enveloppe des lettres peut-elle être en expansion et en translation ? Si non, quelle approche privilégier afin qu’il se dégage un sentiment de cohérence au sein de cet alphabet ?
Cohérence donc, mais si l’on se réfère à la gravure de Dürer, le manque et l’absence de quelque chose d’essentiel à la Mélancolie (relatif à l’unité de son être et symbolisé par la fragmentation, la ruine et l’abandon de l’acte unificateur) est représenté dans la fonte par l’absence de goutte sur le « a » minuscule, tandis que les lettres normalement pourvues de formes terminales en sont logiquement revêtues.
[Fig. 14] Échantillon du caractère typographique Immortel Acedia. En rouge les zones en expansion, en bleu celles en translation. Caractère typographique et design de l’auteur.
Par ailleurs, la mélancolie, telle que définie par le TLFi, est « une des quatre humeurs qui, selon la théorie ancienne des tempéraments, était supposée avoir son siège dans la rate et prédisposer à la tristesse, à l’hypocondrie ».[17] Selon cette théorie, l’être humain est constitué de quatre humeurs, chacune correspondant à un tempérament particulier : — le sang, produit par le foie et reçu par le cœur, amène à l’individu un caractère sanguin, soit jovial ou chaleureux ; — la phlegme, humeur rattachée au cerveau, amène un caractère lymphatique, sans vigueur, lent ; — la bile jaune, provenant également du foie, reconnaissable sur le plan caractériel à des tendances marquées à l’irritabilité, au pessimisme et à l’aigreur ; — enfin, l’atrabile, ou bile noire, provenant de la rate consiste en un dépôt sombre et épais d’impuretés, dont les vapeurs s’élevaient jusqu’au cerveau pour y produire des idées noires.[18] Dans Immortel Acedia, l’épaisseur des fûts des lettres représente l’importante quantité de ce « dépôt sombre et épais d’impuretés » dans le corps, ici, non de l’être humain, mais de la lettre. [19]
Ce caractère tire donc parti de deux gestes, et par extension, de deux styles de l’Histoire de la typographie. Les formes de l’Immortel Acedia sont en définitive une synthèse, parfois grossière, des garaldes (formes triangulaires) et des didones (formes rectangulaires).
[Fig. 15] Échantillon du caractère typographique Immortel Acedia. Caractère typographique et design de l’auteur.
Cette synthèse a aussi été mise en œuvre dans les italiques, notamment pour celle de mise en exergue. Si la répartition des masses de certaines lettres suit une logique de construction en expansion, son rythme est plus proche d’une garalde dans sa structure et sa rapidité d’exécution.
[Fig. 16] Échantillon du caractère typographique Immortel Acedia Italique Exergue (en cours). Caractère typographique et design de l’auteur.
[Fig. 17] Échantillon des caractères typographiques Immortel Infra (trois premières lignes) et Acedia (trois dernières lignes). Caractères typographiques et design de l’auteur.
…à propos de l'Immortel (« infra-variable font », famille élargie et multiplexage), découvrez la présentation complète du caractère par Clément Le Tulle-Neyret à l’ANRT en mars 2018.
Clément Le Tulle-Neyret (ANRT2016), Immortel publié par ENSAD Nancy sur Vimeo.
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À l'occasion du finissage de l'exposition « One Piece at a Time : les arts tactiques au travail » au Cabinet du livre d'artiste, la revue La Perruque et le journal Sans niveau ni mètre co-éditent ce numéro spécial en mettant à l'honneur le caractère utilisé dans le journal : l'étrange Covington bricolé par Derek Vogelpohl.
Le Covington est une fonte de Derek Vogelpohl (ShyFonts) dessinée pour la fonderie Apostrophic Lab, l'une des fonderies les plus dynamiques de 2000 à 2003. Le «Lab» était dirigé par Apostrophe (Fredrick Nader) à Toronto et a publié plus de 1000 polices gratuites originales, dans tous les formats (Type 1, TrueType et Opentype, PC et Mac). Presque toutes les polices ont des jeux de caractères complets et beaucoup d'entre elles ont des jeux de caractères étendus pour les langues européennes et le cyrillique.
Source : Luc Devroye
« ONE PIECE AT A TIME : LES ARTS TACTIQUES AU TRAVAIL » Cabinet du livre d'artiste, Rennes, 20.09–20.12.2012 Commissariat : Jil Daniel, Jan Middelbos, Aurélie Noury
« One Piece at a Time » présente un inventaire (provisoire, non-exhaustif et subjectif) de propositions et documents résultant de conduites tactiques et d’attitudes de résistance menées à partir du poste de travail. L’exposition prend la forme d’une bourse du travail parallèle mettant en partage des savoirs (autour d’ateliers, de conférences, de projections et de présentations de documents); des moyens de production (perruques, détournements, retournements…); des réalisations (dons, échanges).
Plusieurs intérêts sont à l’origine de cette proposition :
« One Piece at a Time » est aussi l’occasion de vérifier l’actualité de ces pratiques et d’en éprouver les limites, que ce soit dans le domaine de l’art ou au-delà. Enfin, cette exposition offre l’opportunité de s’introduire dans les entreprises, et cela par le biais des acteurs de ces mondes : les salariés. Il s’agit de rendre visible ce qui est habituellement caché derrière les portes closes des univers privés de la production et d’assumer collectivement et publiquement le caractère politique que peuvent revêtir ces formes de réappropriation/redistribution directe des savoir-faire, des moyens de production et du temps travail, pratiques habituellement individuelles et (semi-)clandestines. S’ouvre ainsi la possibilité de générer du « faire avec » en résistance, et de produire des « micro-utopies » travaillées à partir du réel.
Sans niveau ni mètre. Journal du Cabinet du livre d’artiste est publié conjointement par les Éditions Incertain Sens, le Fonds régional d’Art contemporain de Bretagne et l’École des beaux-arts de Rennes.
Un numéro est publié à chaque exposition à 1000 exemplaires et distribué gratuitement. Le numéro en cours est disponible au Cabinet du livre d'artiste, au FRAC Bretagne ou sur demande. Chaque numéro est également téléchargeable directement au format PDF à cette adresse.
Ce numéro spécial co-édité avec La Perruque en constitue la 47e livraison.
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Une équipe de lunariens s'empare du quinzième numéro de La Perruque à l'occasion d'un workshop à La Cambre. Les étudiants de différents ateliers (design, communication graphique, typographie, animation) ont conçu collectivement le spécimen du caractère de Julien Vallet : le Mange-pierre. Sous couvert d'une mission spatiale sur la lune (appelons-la Apollo 15), ils expérimentent les enjeux de la typographie en cartographie et proposent une application utopique de la technologie des variable fonts pour un dessin de cartes essentiellement typographique, fait de « lettres-montagnes, de ligatures-océans et de ponctuations rivières ».
Si le spécimen imprimé cartographie une seule longitude de la circonférence lunaire, de nombreuses autres appropriations du caractère de Julien Vallet s'affairent à couvrir le reste de la surface du satellite. L'ensemble de ces appropriations (un mapping vidéo, une documentation élargie, un spécimen animé et le design d'un dispositif d'exposition sur mesure) révèlent et mettent à l'épreuve les intentions typographiques de l'auteur. Elles seront rendues visibles lors du lancement de ce numéro le 22 mars 2019 à Bruxelles, jour de pleine lune.
« Faire la carte, et pas le calque. L'orchidée ne reproduit pas le calque de la guêpe, elle fait carte avec la guêpe au sein d'un rhizome. Si la carte s'oppose au calque c'est qu'elle est tout entière tournée vers une expérimentation en prise sur le réel. La carte ne reproduit pas un inconscient fermé sur lui-même, elle le construit. […] Elle peut-être déchirée, renversée, s'adapter à des montagnes de toute nature, être mise en chantier par un individu, un groupe, une formation sociale. On peut la dessiner sur un mur, la concevoir comme une œuvre d'art, la construire comme une action politique ou comme une méditation. » (Gilles Deleuze, Félix Guattari, Rhizome, 1980).
Vernon Fischer, Man cutting globe, 1992.
La cartographie est la production d'un discours sur un territoire à une époque donnée. Entre « espace inventaire et espace inventé » (Georges Perec, Espèces d'espaces), la carte délimite et décline visuellement un mode de pensée par sélection, hiérarchie, style et rhétorique. Miroir d'un regard soumit à des injonctions sociales et politiques, image-projection de la terre (ici la lune), l'espace cartographique est nécessairement subjectif. Il est un message codifié par un langage commun entre auteur et lecteurs et qui impose une grille d'interprétation. Loin de la neutralité tant vantée par les institutions cartographiques qui tendent à faire passer leurs œuvres pour la nature elle-même, l'art cartographique est « la faculté de découvrir spéculativement ce qui, dans chaque cas, peut être propre à persuader » (Aristote, Rhétorique, Gallimard, 1998, livre I, p. 22). L'espace cartographique doit redevenir dialogue.
Schul-Atlas, C.Diercke und E.Gaebler, Braunschweig, Georg Westermann Verlag, 1907.
« Lieu privilégié de l'entraide respectable entre le texte et la figure » (in Cartes et Figures de la Terre, Centre Georges Pompidou, 1980), où tout écart doit être supprimé au risque de perdre cette efficacité tant recherchée, la carte est à l'apogée de l'objet fonctionnel. Mais s'il apparaissait des lettres-montagnes, ligatures-océans et des ponctuations rivières, évoluant dans une relation amoureuse ou conflictuelle entre forme et signification ? Au détriment de la lisibilité, certainement. Qu'importe, n'en sommes-nous pas là où, à l'opposé de normes et de rythmes toujours plus brutalement imposés, la rapidité, l'efficacité et l'uniformisation doivent être à tout prix combattues ? Revenir à une poétique de la représentation spatiale et lettresque, à une re-subjectivisation et une re-collectivisation des espaces, à un être-là ?
Je propose ainsi la création d'un nouveau langage cartographique basé sur une refonte des espaces et de la relation que l'on entretien avec ces derniers, une recherche visuelle et textuelle sur les nouveaux territoires et les luttes qui s'y joignent, manifester ce qui « a lieu » ou ce qui « vient ». Reprendre le « corps commun » et le « Nous primordial » (Fernand Deligny, Lignes d'Erre) comme base pour la création de formes (fontes ?) variables, littéralement typographique, mais aussi au sens plus large d'un caractère artistique commun à une recherche de couleurs, pensées et gestes. En divers espaces (libres, critiques, spectaculaires, imaginaires, néants), réinventer une nouvelle cartographie de l'information et de la désinformation, de l'ensemble et du fragment, du lieu et du non-lieu.
Schul-Atlas, C. Diercke und E. Gaebler, Braunschweig, Georg Westermann Verlag, 1907.
Projection et mouvement d'une pensée par l'objet lettre sur une représentation territoriale. Expérimentation de Julien Vallet.
G. Alinhac, Cartographie théorique et technique, Premier fascicule, Éléments constitutifs de la carte et moyens d'expression cartographiques, IGN, 1962.
Principes de composition des écritures cartographiques, schémas didactiques composés avec la typographie Endroit, dessinés par Sébastien Biniek dans le cadre de son DNAT. (.txt, ESAD Grenoble-Valence, 2013, p.78 & 88).
Dessins préparatoires à la création du caractère Mange-pierre.
« L'espace commence ainsi, avec seulement des mots, des signes tracés sur la page blanche. Décrire l'espace : le nommer, le tracer, comme ces faiseurs de portulans qui saturaient les côtes de noms de ports, de noms de caps, de noms de criques, jusqu'à ce que la terre finisse par ne plus être séparée de la mer que par un ruban continu de texte. L'aleph, ce lieu borgésien où le monde entier est simultanément visible, est-il autre chose qu'un alphabet ? »
(Georges Perec, Espèces d'espaces, Galilée, 1974, p. 21).
Projection lenticulaire d'une information spatiale.
Séparation par calques et déformations optiques.
Échantillons du caractère typographique Mange-pierre.
Caractère typographique et design de l’auteur.
« Telles sont les “ cartes ” que le destin met entre nos mains au départ. Mais très vite la partie s'engage et c'est à nous – je veux dire à notre libre volonté – de jouer. »
(Michel Tournier, Le miroir des idées, Gallimard, 1994).
http://strabic.fr/subjectivite-cartographiee https://mappingpoliceviolence.org/ https://lundi.am/Le-pouvoir-est-logistique-Bloquons-tout http://derives.tv/lignes-d-erre/ https://davidrumsey.reprintmint.com/ http://www.notbored.org/the-scp.html http://radio.garden/live/manchester/paulfmradio/
Anicé Arshia Azmat Olivier Bertrand Baptiste Betoulaud Louis-Pierre Caussanel Adèle Dendaletche Lola Giffard-Bouvier Laure Giletti Pierre Huyghebaert Alexis Morisson Sebastien Rabaste Hugo Roger Francisco Santamouris Marie Theurier Laurine Tribolet Julien Vallet
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Weiyi Li soumet les lettres de l’iconique Helvetica à la gravité terrestre. Elle file ainsi la métaphore que le vocabulaire typographique sous-tend en décrivant les caractéristiques physiques des lettres, comme par exemple leurs poids – “weight” en anglais –, la « densité » d’un gris typographique, ou encore le « centre de gravité » des caractères chinois.
En 2015, deux amies m'ont invité à concevoir le logo de PRACTICE, un espace d'art qu'ils mettaient alors sur pied dans le Lower East Side à New York. Comme vous pouvez aisément l’imaginer, PRACTICE est entouré de nombreux restaurants chinois. Voici le courrier électronique que j’ai reçu à la fin du mois de Septembre de la part de Cici, l'une des fondatrices de cet espace :
Dans son courriel, elle décrit cet espace d’exposition à l’aide de deux objets: les montagnes et les jouets. Quand Cici parle de montagnes, elle ne fait pas référence à ces énormes corps géologiques, mais plutôt à une tendance à la hausse ou à la baisse, et lorsqu’elle parle de jouets, elle les utilise comme la représentation matérielle de l’acte de jouer.
Tout en essayant de trouver une direction entre ces deux métaphores, ma réponse à cette commande tendait à expérimenter pratiquement une idée qui me passionnait depuis longtemps. Les graphistes utilisent depuis longtemps divers termes physiques pour décrire la composition typographique. Ils utilisent le terme “weight” (le poids) pour décrire les différentes graisses et « densité » pour décrire le gris typographique des paragraphes. Les concepteurs de caractères chinois insistent même sur le « centre de gravité » d'un caractère. Mais que se passe-t-il si nous considérons littéralement la nature physique des lettres et des langues? Et si les lettres avaient réellement une épaisseur et un poids, comment seraient-elles affectées par la gravité? Si elles étaient plongées dans l'eau, quelle seraient leur flottabilité? Si je lâche les lettres – et donc leurs masses volumiques – depuis le ciel, de quelle manière retomberont-elles au sol en fonction de leurs propriétés physiques? Et enfin, quelles formes cela produirait-il? J’ai donc fabriqué ce petit jouet avec lequel je me suis amusé pendant un moment :
Et ce « jouet », s'il est placé dans l'espace, peut être un objet avec lequel tout le monde peut jouer.
Ce logo est toujours positionné aux limites du support, peu importe le format du papier ou du navigateur. Pour l’anecdote, c’est la première fois que j'utilisais l’Helvetica depuis des années. J’avais besoin d'une police que tout le monde connaît, presque ennuyeuse, pour que le jeu en soit d’autant plus intéressant.
Ce logo reflète son environnement. Avez-vous déjà vu les panneaux de signalisation usés ou incomplets des restaurants chinois du Lower East Side? Il s’agit aussi de montagnes, avec des mouvements instables de montées et de descentes, d'accumulation et de dispersion; un jouet ou une partie de jeu alimentée par tou-te-s celles et ceux qui y prennent part, consciemment ou inconsciemment; une pratique, un exercice entre le contrôle et le hors de contrôle.
Deux ans plus tard, les deux fondatrices de PRACTICE ont invité leurs ami-e-s à participer à une exposition. J’en ai profité pour développer mon projet en soumettant tous les glyphes de l’Helvetica à la gravité et ainsi dessiner la fonte avec laquelle était composée le texte de présentation de cette exposition. Pour cela, j’ai utilisé un simulateur de gravité bidimensionnel. Le produit de la chute de l’ensemble des caractères dessine alors une nouvelle police, l’Helvetica On The Earth.
Pour développer ce projet, ma complice aura toujours été la gravité : ce pouvoir qui nous fatigue les genoux, brise les écrans de nos téléphones portables et laisse tomber nos joues et nos seins. Autrefois, nous considérions cela comme un problème, c’est pourquoi nous avons construit des tables et des chaises pour ne plus devoir être assis par terre, ou des gratte-ciels pour chercher plus d’espace à la vertical. Aujourd'hui, dans tous les domaines, il semble que nous nous soyons réapproprié cette force invisible. Par exemple dans le domaine de la danse moderne, il y a beaucoup de mouvements qui opèrent au plancher, attirés par la gravité – alors que les dans-euses-eurs de ballet classique lutaient pour s’en débarrasser. Si le code informatique a également des propriétés physiques, la direction de la gravité dans le monde HTML est exactement le contraire de celle du monde réel. La gravité du code HTML est ascendante et sinistrogyre. En d'autres termes, si vous utilisez du code pour placer du texte ou des images sur une page Web, elles seront toutes attirées par la gravité située dans le coin supérieur gauche du navigateur. Cependant, il existe aujourd’hui un code Javascript qui simule la gravité terrestre. Le fruit a mûrit et est tombé, comme si, après avoir longtemps lutter pour s’en affranchir, le temps était désormais venu pour que nous renouions des liens avec cette force gravitationnelle : jouer avec elle plutôt que de chercher à la combattre.
Traduit du mandarin vers l’anglais par Weiyi Li, puis de l’anglais au français par Olivier Bertrand.
Weiyi Li est une artiste weiyi.li, designer weiyiandfriends.com, curatrice bigbadgallery.com, éditrice re-publication.com et détaillante currently-available.com qui vit et travaille entre ces URLs.
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En 2017, lorsqu’il dessine la “Fit”, David Jonathan Ross est l’un des premiers à se saisir de la technologie des variable fonts. Avec ce caractère – un manifeste? –, il démontre de manière flagrante les infinies possibilités de variations qui sont désormais données aux designers pour composer du texte. 2 ans après, la démonstration semble toujours aussi pertinente, bien que la technologie s’avère être encore souvent utilisée pour ses effets spectaculaires dans nombre des projets typographiques qui ont vu le jour depuis.
Fit est conçue pour se compresser et s'étirer de façon à occuper un vaste spectre de proportions, des plus étroites aux plus larges. L’éprouver dans la revue La Perruque semblait un exercice logique, compte tenu de son format à la fois extrêmement étroit et extrêmement long de 1 × 90 cm.
À l’époque de sa sortie en 2017, Fit était l’une des premières variable fonts à paraître et, à mon sens, le prémisse de cette fonte n'aurait probablement pas pu s’énoncer sans cette nouvelle technologie. Aussi, je souhaitais que ce caractère soit une démonstration flagrante de ce que signifie l’acte de donner aux designers un accès direct à des milliers de variations finement graduées au sein d’une composition typographique.
Pour dessiner le spécimen de La Perruque, j’ai pris plaisir à utiliser Drawbot, un outil de dessin 2D basé sur Python. Cela m'a permis d'expérimenter rapidement quelques idées, comme par exemple le fait d’utiliser une largeur différente pour chaque lettre du spécimen. Au final, les largeurs reflètent son contenu pour présenter une poignée d’instances représentant l’amplitude des variations de Fit.
Alors que le recto présente la variabilité de Fit, le verso se concentre sur ses contre-formes. Flottant dans une mer de noir, les contre-formes de Fit sont les véritables stars du spectacle, permettant à la police de rester cohérente dans toutes ses variations. Ces formes traversent les lettres de manière spectaculaire, en négatif, les fondant ainsi dans un réseau hypnotique de noir et blanc (ou de violet et de blanc, selon le cas).
Traduit de l’anglais par Olivier Bertrand.
David Jonathan Ross dessine des lettres de toutes formes et de toutes tailles, pour ses propres projets ou pour des commandes. Originaire de Los Angeles, il a commencé à dessiner des polices de caractères au Hampshire College et a rejoint The Font Bureau en 2007, où il a perfectionné sa souplesse en gymnastique de Bézier. Aujourd’hui, il publie ses caractères dans sa propre fonderie, DJR, et travaille sur des projets avec Type Network. Il est également à l’initiative du Font of the Month Club, où il partage des exclusivités ainsi que des fontes display ou expérimentales. Vous le trouverez dans les bois de l'ouest du Massachusetts avec sa partenaire Emily et leurs deux chiens.
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Inspiré par le travail de l’artiste italienne Tomaso Binga, Lucas Le Bihan a développé la Cucina dans la perspective d’un projet éditorial culinaire. La Cucina associe une structure rigide à la célérité controlée d’une fonte scripte. Son spécimen-recette a été concocté pour La Perruque en collaboration avec le chef du Refettorio Paris, Maxime Bonnabry-Duval.
Cucina est une police de caractère initiée après la découverte du travail de l’artiste italienne Tomaso Binga. Elle associe la structure rigide et industrielle du Clarendon à la célérité controlée d’une fonte scripte. Comme deux antagonistes que l’on aurait forcés à travailler ensemble, ils finissent par prendre le pli pour faire équipe.
Tomaso Binga, E di erba et C di Ciliegia, Alfabetiere Pop, 1976.
DiaType Egizio, photographié dans les archives de la Kunstbibliothek, Berlin, 2018.
Mis entre parenthèse pendant plus d’un an, j’ai repris le dessin du Cucina dans le cadre du projet de recueil de fiches-recettes « La Cuisine des copains » initié par Lisa Carpagnano. Lisa cherchait une typographie appropriée pour accompagner ses illustrations à la craie. Les brouillons que je lui présentais alors étaient proches de ceux qu’elle avait elle-même entrepris dans ses premiers essais. Lisa m’a donc invité à développer ce caractère tout en lui fournissant un cadre conceptuel.
Lisa Carpagnano, La Cuisine des copains.
Cucina, 09.01.2019.
C’est donc en toute logique que je mets en scène ce caractère dans une recette de cuisine pour La Perruque. Adapté pour l’occasion par Maxime Bonnabry-Duval, chef au Refettorio Paris, le plat raconte une belle histoire : fruit de la mer Bretonne, l’encre sèche du typographe.
Cucina, 15.07.2019, impression par Good Surface.
Lucas Le Bihan est un typographe et designer graphique breton formé à l’école Estienne à Paris. En 2016 il obtient le Diplôme supérieur de design typographique. Son mémoire et son projet de diplôme traitent du dessin de caractère depuis la figure de l’ingénieur. Il a collaboré avec plusieurs studios, en France avec Raphaël Bastide et Large Projects ainsi qu’au Japon chez Nosigner avec Toshikuki Nakaie. Bénévole chez la fonderie Velvetyne, il participe à la diffusion de la culture du libre de droit dans le milieu de la typographie française. En novembre 2016 il lance Bretagne, une micro-fonderie qui distribue des caractères typographiques dans différents secteurs: industriel, culturel… Il dessine aussi des caractères typographiques sur mesure pour des clients internationaux. Depuis 2016, il forme avec James Briandt le bureau de design graphique Dreams Office.
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